Manuel Alegre (1936 -) : Requiem
Requiem
Il y a des morts qui tardent à mourir.
Inutile de les enterrer ils reviennent
s’attardent parfois dans une ombre
sur un bras de fauteuil ou le bord ébréché
d’une tasse. Ou alors ils se cachent
dans des petites boîtes sur les tables.
Il y a des objets qu’ils habitent encore
et sont comme le visage transfiguré des absents
leur marque dans la maison et dans l’éphémère.
C’est pourquoi il est si dur de retirer l’assiette et le couvert
ranger les habits défaire
le lit. Il y a des morts
qui jamais plus ne s’en vont.
Il y a des morts qui ne cessent de faire mal.
Traduit du portugais par Michel Chandeigne
in, « Anthologie de la poésie portugaise contemporaine,1935 – 2000 »
Editions Gallimard (Poésie), 2003
Du même auteur : l’Armoire / O Armário (26/05/2024)
Requiem
Há mortos que demoram a morrer.
é inútil sepultá-los eles voltam
demoram-se por vezes numa sombra
num braço de cadeira ou no rebordo partido
de uma chávena. Ou então escondem-se
em pequenas caixas sobre as mesas.
Há objectos que ficam cheios deles
são como o rosto transmudado dos ausentes
sua marca na casa e no efémero.
Por isso custa tanto retirar o prato e o talher
arrumar os fatos desfazer
a cama. Há mortos
que nunca mais se vão embora.
Há mortos que não param de doer.
Obra poetica
Editora Dom Quixote, Lisboa, 1989
Poème précédent en portugais :
Al Berto : La mort de Rimbaud / Morte de Rimbaud (16/03/2023)
Poème suivant en portugais :
Fernando Pessoa : Poèmes désassemblés (II) / Poemas Inconjuntos (II) (20/06/2023)