Salvatore Quasimodo (1901 – 1968) : Temple de Zeus à Agrigente / Tempio di Zeus Ad Agrigento
Temple de Zeus à Agrigente
La jeune fille assise dans l’herbe relève
les cheveux rêches de sa nuque et rit
de sa course et du peigne égaré.
Elle ne dit pas sa couleur, s’il fut arraché
par la main de feu qui salue
au loin derrière un amandier, où s’il finit
sur la mosaïque du cerf grec au bord
du fleuve, ou dans un fossé d’épines violettes.
Et elle rit, la folie des sens, elle ne cesse de rire
sur sa peau de canicule
à midi de l’île,
et l’abeille luisante siffle et décoche
ses venins, ses pièges pour des étreintes innocentes.
En silence nous regardons ce signe
d’ironique mensonge : et pour nous brûle
à la renverse la lune en plein jour, qui tombe
dans le feu vertical. Quel avenir
peut nous lire le puits
dorique, quelle mémoire ? Le seau remonte
lentement du fond et ramène de l’herbe, des visages
à peine connus.
Tu tournes, vieille roue du dégoût,
roi mélancolie qui prépares le jour ;
en tout temps consciencieuse, qui réduis en ruines
images angéliques et miracles,
qui jettes la mer dans la lumière étroite
d’un œil !Le télamon est ici, à deux pas
de l’Hadès (murmure étouffant, immobile),
couché dans le jardin de Zeus, il désagrège
sa pierre avec la patience d’une larve
de l’air : il est ici, jointure sur jointure,
parmi les arbres éternels, d’une seule semence.
Traduit de l'italien par Roland Ladrière
in, Salvatore Quasimodo : "Oeuvres poétiques"
Editions de Corlevour, 92110 Clichy,2021
Du même auteur :
Et c’est bientôt le soir / Ed è subito sera (01/11/2014)
J'entends encore la mer / S’ode ancora il mare (15/04/2018)
Devant le gisant d’Ilaria del Carretto / Davanti al simulacro d’Ilaria Del Carretto (15/04/2019)
Anno Domini MCMXLVII (15/04/2020)
Vent à Tyndaris / Vento a Tindari (15/04/2021)
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Les retours / I Ritorni (15/04/2023)
Glendalough (06/10/2023)
: Ô mes doux animaux / O miei dolci animali (15/04/2024)
Dialogue / Dialogo (06/10/2024)
Tempio di Zeus Ad Agrigento
La ragazza seduta sull’erba alza
dalla nuca i capelli ruvidi e ride
della corsa e del pettine smarrito.
Il colore non dice o se strappato
dalla mano rovente che lontana
saluta dietro un mandorlo o finito
sul mosaico del cervo greco in riva
al fiume o in un fosso di spine viola.
E ride la follia dei sensi, ride
continua alla sua pelle di canicola
meridiana dell’isola
e l’ape lucida zufola e saetta
veleni e vischi d’abbracci infantili.
In silenzio guardiamo questo segno
d’ironica menzogna: e per noi brucia
rovesciata la luna diurna e cade
al fuoco verticale. Che futuro
ci può leggere il pozzo
dorico, che memoria? Il secchio lento
risale dal fondo e porta erbe e volti
appena conosciuti.
Tu giri antica ruota di ribrezzo,
tu malinconia che prepari il giomo
attenta in ogni tempo, che rovina
fai d’angeliche immagini e miracoli,
che mare getti nella luce stretta
d’un occhio! Il telamone qui, a due passi
dall’Ade (mormorio afoso, immobile),
disteso nel giardino di Zeus e sgretola
la sua pietra con pazienza di verme
dell’aria: qui, giuntura su giuntura,
fra alberi eterni per un solo seme.
(Dalla Sicilia)
Il falso e vero verde
Mondadori, Milano (Italia), 1956
Poème précédent en italien :
Eugenio Montale : « Ne t’abrite pas à l’ombre... » / « Non rifugiarti nell'ombra... » 08/02/2022)
Poème suivant en italien :
Cesare Pavese : Dépaysement / Gente Spaesata (18/04/2022)