Jorge Luis Borges (1899-1986) : Nuages / Nubes
Nuages
Nulle chose au monde qui n’ait été
nuages. Nuages, les cathédrales,
vitraux bibliques et roc monumental,
que rasera le temps. Et l’Odyssée,
changeante comme la mer. Et distincte
chaque fois que nous l’ouvrons. Ton visage
dans le miroir reflète une autre image
et le jour un incertain labyrinthe.
Nous sommes ceux-là qui partent. Profus
le nuage qui s’efface au couchant
est à notre semblance. Constamment
la rose en autre rose se transmue.
Tu es nuage et mer, tu es oubli.
Tu es aussi les choses qui t’ont fui.
Traduit de l’espagnol par Jacques Ancet
In, Jorge Luis Borges : « La proximité de la mer »
Editions Gallimard, 2010
Du même auteur :
Art poétique / Arte poética (08/11/2014)
Œdipe et son énigme / Edipo y el enigma (08/11/2015)
Nubes
No habrá una sola cosa que no sea
una nube. Lo son las catedrales
de vasta piedra y bíblicos cristales
que el tiempo allanará. Lo es la Odisea,
que cambia como el mar. Algo hay distinto
cada vez que la abrimos. El reflejo
de tu cara ya es otro en el espejo
y el día es un dudoso laberinto.
Somos los que se van. La numerosa
nube que se deshace en el poniente
es nuestra imagen. Incesantemente
la rosa se convierte en otra rosa.
Eres nube, eres mar, eres olvido.
Eres también aquello que has perdido.
Los conjurados
Alianza Editorial, Buenos Aires (1985)
Poème précédent en espagnol:
Pablo Neruda : Pays / País (02/11/2024)
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