Sylvia Plath (1932 – 1963) : Coquelicots... / Poppies...
Coquelicots en juillet
Petits coquelicots, petites flammes d'enfer,
N e faites-vous point de mal ?
Vous vacillez. Je ne puis vous toucher.
Je mets mes mains parmi les flammes. Rien ne brûle.
Et cela m’épuise de vous regarder
Vacillant ainsi, ridés et rouge clair, comme la peau d’une bouche.
Une bouche juste en sang.
Bon sang de petites jupes !
Il est des vapeurs que je ne puis toucher.
Où sont vos opiacés, vos capsules nauséeuses ?
Si je pouvais saigner, ou dormir ! —
Si ma bouche pouvait épouser pareille blessure !
Ou vos liqueurs s’infiltrer en moi, dans cette capsule de verre,
Devenant monotone et immobile.
Mais incolore. Incolore.
20 juillet 1962
Coquelicots en octobre
Même les nuages de soleil ce matin ne peuvent tenir pareilles jupes.
Ni la femme dans l’ambulance
Dont le cœur rouge s’épanouit à travers son manteau, abasourdi —
U don, un don d’amour
Absolument offert
Par un ciel
Pâle et enflammé
Allumant ses monoxydes de carbone, par des yeux
Vitreux, pétrifiés sous des chapeaux melons.
Ô mon Dieu, que suis-je
Que ces bouches tardives s’écrient ouvertes
Dans une forêt de gel, dans une aube de bleuets.
27 octobre 1962
Traduit de l’américain par Jacqueline Royer-Hearn
In, Revue « Poésie « N° 57 »
Editions Belin, 1991
De la même autrice :
L’agneau de Marie / Mary’s Song (11/10/2015)
Lettre d’amour / Love letter (11/10/2016)
Berck plage / Berck-plage (11/10/17)
Wuthering Heights(11/10/2018)
Traversée / Crossing the water (03/12/2023)
Poppies in july
Little poppies, little bell flames,
Do you do no harm?
You flicker. I cannot touch you.
I put my hands among the flames. Nothing burns.
And it exhausts me to watch you
Flickering like that, wrinkly and clear red, like the skin of a mouth.
A mouth just bloodied.
Little bloody skirts !
There are fumes that I cannot touch.
Where are your opiates, your nauseous capsules ?
If I could bleed, or sleep ! —
If my mouth could marry a hurt like that !
Or your liquors seep to me, in this glass capsule,
Dulling and stilling.
But colorless. Colorless.
Poppies in october
Even the sun-clouds this morning cannot manage such skirts.
Nor the woman in the ambulance
Whose red heart blooms through her coat so astoundingly —
A gift, a love gift
Utterly unasked for
By a sky
Palely and flamily
Igniting its carbon monoxides, by eyes
Dulled to a halt under bowlers.
O my God, what am I
That these late mouths should cry open
In a forest of frost, in a dawn of cornflowers.
The Collected Poems.
Harper & Row, New-York,1981
Poème précédent en anglais :
Richard Murphy : High Island 16/11/2024)
Poème suivant en anglais :
Louise Glück : Minuit / Midnight (06/12/2024)