Eugenio Montale (1896 – 1981) : Sarcophage / Sarcofaghi
Sarcophage
Où vont-elles les frisottantes jouvencelles,
Sur l’épaule portant leurs amphores remplies ?
Si léger est leur pas quand il s’immobilise ;
Au bout de leur chemin s’ouvre une combe
Dans une vaine attente
Des belles, ombragées par une treille
Aux grappes pendantes qui se balancent.
Sous le soleil qui monte
Les pentes entrevues n’ont aucune couleur.
Suave instant où la nature foudroyée,
Mère et non marâtre,
Fait prendre à ses créatures des poses
Et léviter leurs silhouettes.
Est-ce un monde en sommeil ou glorieux
D’une existence inchangée ? Qui peut le dire ?
Ö toi qui passes, donne-lui
Le surgeon le meilleur de ton jardin
Et après poursuis ton chemin, dans cette combe
Ténèbres et clarté n’ont aucune alternance.
C’est loin d’ici que ton chemin te mène
Point d’asile pour toi qui est trop mort :
Suis les étoiles dans leur révolution.
Et don adieu, frisottantes jouvencelles ;
Sur l’épaule portez vos amphores remplies.
Traduit de l’italien par Sicca Venier
In, « Poètes d’Italie, Anthologie des origines à nos jours »
Editions de la Table Ronde, 1999
Du même auteur :
« A midi faire halte …/ « Merrigiare pallido… » (10/05/2016)
La bourrasque / La bufera (14/08/2019)
Bateaux sur la Marne / Bache sulla Marna (14/08/2020)
Correspondances (08/02/2021)
« elle traversait pieds nus... » (13/08/2021)
« Ne t’abrite pas à l’ombre... » / « Non rifugiarti nell'ombra... » 08/02/2022)
Midi / « Gloria del disteso mezzogiorno... » (14/08/2022)
Côtes de Ligurie... » / « Riviere... » (08/02/2023)
« Ne nous demande pas le verbe... » / « Non chiederci la parola... » (13/08/2023)
Quatre poèmes / Quattro poesie (08/02/2024)
Sarcofaghi
Dove se ne vanno le ricciute donzelle,
che recano le colme anfore su le spalle
ed hanno il fermo passo sì leggero;
e in fondo uno sbocco di valle
invano attende le belle
cui adombra una pergola di vigna
e i grappoli ne pendono oscillando.
Il sole che va in alto,
le intraviste pendici
non han tinte: nel blando
minuto la natura fulminata
atteggia le felici
sue creature, madre non matrigna,
in levità di forme
Mondo che dorme o mondo che si gloria
d'immutata esistenza, chi può dire?
uomo che passi, e tu dagli
il meglio ramicello del tuo orto.
Poi segui: in questa valle
non è vicenda di buio e di luce.
Lungi di qui la tua via ti conduce,
non c'è asilo per te, sei troppo morto:
seguita il giro delle tue stelle.
E dunque addio, infanti ricciutelle,
portate le colme anfore su le spalle.
Ossi di seppia
Gobetti Editore, Torino, 1925
Poème précédent en italien :
Andrea Zanzotto : Bucolique / Bucolica (01/08/2024)
Poème suivant en italien :
Lapo Gianni: « Je veux, Amour... » / « Amor, eo chero... » (21/09/2024)