Vladimír Holan (1905 – 1980) : Eodem anno pons ruptus est
Eodem anno pons ruptus est
La joie !
Elle est, elle est vraiment, est pour de vrai !
Et il l’a ressentie, et point comme une joie sans pitié
se ruant si brutalement sur nous
qu’elle éteint ce feu, en nous, que rien ne protège ;
ni comme une joie pleine de vertige, au double éclairage de l’ironie
nous apportant la bouteille et les chaussures qui font danser –
oh non, ce qu’il a ressenti n’est une joie simple, silencieuse, sans raison,
et pas pour l’instant seul confiée : une joie donnée,
joie de cet homme qui marche sur un pont
et, désormais, va chanter sans fin...
Il a pourtant suffi qu’une feuille sèche, poussée par le vent,
tombe là, près de lui,
et voilà le pont surchargé...
Traduit du tchèque par Petr Král
In, « Anthologie de la poésie tchèque contemporaine, 1945 – 2000 »
Editions Gallimard (Poésie), 2002