Mohammad Fouad (1961 -) : La dernière nuit d’un homme
La dernière nuit d’un homme
Que l’on soit
ensemble par exemple.
Que je dise :
maintenant on s’assiérait pour dîner
on échangerait beaucoup de paroles
et un silence qui n’échapperait à personne.
Supposons
que je t’aie parlé du jardin,
et l’herbe a poussé sous tes pieds,
que, par malice évidente,
tu aies tendu la main
et m’aies ôté la chemise du temps.
Par l’unique fenêtre de la chambre
il y avait un petit astre
- avec une frange sur k front –
qui te guettait
(le scélérat
il rougissait de timidité chaque fois que je t’embrassais !)
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Je m’en souviens précisément
je m’en souviens précisément
on avait beaucoup ri
beaucoup dansé
et en cinq minutes seulement
nous avons mis au monde des millions d’enfants
et assuré le début
d’un espace de liberté
des formes innombrables
d’un bon pays
susceptible d’amour,
et sans le moindre doute
nous avons bu jusqu’à la dernière goutte
à la santé de ce monde...
comme
cela arrive toujours
Qu’elle fut heureuse, cette nuit
combien son âme frémit
lorsqu’il s’en souvient maintenant
l’homme solitaire.
La Tyrannie de la parole
Alep, 1990
Traduit de l’arabe par Saleh Diab
in, « Poésie syrienne contemporaine. Edition bilingue »
Le Castor Astral éditeur, 2018