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Le bar à poèmes
10 mai 2025

Salah Stétié (1929 - 2020) : Statue de feu

 

Statue de feu

 

 

Un homme s’avance vers la fin des choses


Comme on avance avec un jardin d’arbres


Vers la beauté d’un fleuve oublié par la neige


Près de l’éternité. La fille jeune


Est là dans la flambée de l’eau comme une rose


L’homme s’arrête et la regarde et ses yeux pleurent


Soleil étranglé par la pluie est son amour


Et de ses mains tombe le fruit des choses

 

 

Et de ses mains comme un peu d’eau qui s’ouvre


Tombe la palpitation d’une étoile


Brûlante et seule au-dessus des labours


Qui sont plus purs d’être fils des nuages


Allumés ainsi que statues de l’esprit


Et c’est dans ses rosées la Terre et c’est


La terre avec l’étrangeté des morts


Dormant chacun sa lampe dans les feuilles

 

 

Cet homme avance avec amour vers tous ces morts


Qui sont noyés d’astre solide avec leurs barques


Butant contre la mer fermée. Il est celui


Qui tient encore entre ses bras un arbre en fleurs


Brillant d’invisibilité, violon, colombe


Ce sont là des objets d’infini simple


Etablis près des délirants de l’esprit

 

 

Et quel délire ? Enfant de plusieurs bras


Est l’homme impur entre les bras des femmes


Assis en elles avec son sexe avec son ange


Dans tous les lieux retenus par la mort


Chambre de braise et ses très longues brises


Autour d’eux, homme et femme et fleuve et rive, 


Chambre qui se délite dans la brume

 

 

Homme étendu sa face aimée des nébuleuses


En toute nuit de vent en toute nuit


De tout violon contre le corps des filles


Qui sont soudain comme des ombres rouges


Avec les violons presque tus les géraniums


Leurs feux éteints l’absence de la lune


Les corps étant de nuit barques qui bougent

 

 

Il rêve aussi. Cet homme rêve et rien


Qu’une blessure dans sa main comme une rose


Ou une épée. Femme ou épée ou mort.


Très longue flamme qui fait briller nos rives


Et feu dans la maison du seul, statue


Assise et dévorant le bois de la maison

 

 

 


Fièvre et Guérison de l’Icône


Imprimerie Nationale Editions, 1998

 


Du même auteur :

 
« Sur le plateau pierreux… » (17/07/2014)


Dormition de la neige (10/05/2021)


La terre avec l’oubli (05/11/2021)


Longue feuille du cristal d’octobre 09/05/2022)


L’enfant de cendre (05/11/2022)


Jardin de l’Un (10/05/2023)


La nuit du cœur flambant (05/11/2023)


L’épée des larmes (10/05/2024)


Cécité du chanteur (05/11/2024)

 

Statue de feu  (10/05/2025)

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