Andréï Tourguéniev / Андре́й Ива́нович Турге́нев (1781 – 1803) : « L’angoisse est là... »
à Vassili Joukovski
L’angoisse est là, qui me torture,
Laissant l’esprit inconsolé ;
La vie revient sur la nature
Mais ton ami est isolé
Dans le printemps riant du monde.
Il erre seul et cherche en vain
A être libre une seconde,
A être heureux avant la fin.
Un homme heureux ne peut comprendre,
Ami, les larmes du malheur ;
Mais qui a connu la douleur,
La même angoisse, il sait l’entendre ;
S’il s’était cru heureux un jour,
Et s’il perd tout, et sans retour,
Souffrant les coups d’un sort contraire,
Jour après jour, toujours plus fort,
Sans voir de fin à ses misères,
S’il est voué à mille morts,
Il sait ce qu’est cette souffrance,
Et s’il répond par le silence,
Ce silence est un réconfort.
1803
Traduit du russe par André Markowicz,
In, « Le soleil d’Alexandre. Le cercle de Pouchkine 1802 – 1841 »
Actes Sud, éditeur,2011
Du même auteur : « L’esprit te garde illuminé... » (13/10/2023)