Emmanuelle Favier (1980 -) : A chaque pas, une odeur
A chaque pas, une odeur
Ici les murs de la maison s’évasent en eaux claires
la chaux brune des vastes villages
Boit la majuscule d’un nom.
Et je recrache l’étonnant azur, dessillé du sable
Sur l’épaule précisément la permanence du souffle
De cet arrêt brusque d’un segment.
Je n’ai plus recours qu’aux admirables cendres.
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Derrière les collines, après les lacs, à l’extrémité des champs,
au-delà des trapèzes terrestres, brûlant tant et plus les frontières,
imprégnant à l’herbe le torchis des mers, dispersant fagots et lan-
ternes aux vents étranges ;
Sous les voûtes ; à l’intérieur de chaque creux, entre les parois,
investissant le grain des cloisons, resserrant les pores de l’espace
chaud, accroupissant la pensée,
Mais à plat ventre.
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Elle a couru. Les lacs brillaient.
Tombée à genoux. Dans les arbres plus de feuilles.
Elle a crié. Le lac s’est tu.
Les éléments ont chaviré les uns
dans les autres au long de son cri.
Je lui ai prêté un châle, trop court.
In, Jean Orizet : « La poésie française contemporaine »
Le cherche-midi éditeur, 2004
De la même autrice : Là-bas (10/09/2023)