Marc Guyon (1946 -) : Lydienne
Lydienne
(extrait)
Ne me conduis pas hors de moi je te préfère
Presque sœur et semblable à ce qui fleurit
Que je ne succombe pas à ton nom
Ce qui nous constitue en propre
Doit mesurer Sur la frontière du désert
Eclate la mer brûlante où sont enfouis les héros
Leurs voix sanctifient nos pieds
Dans le discord de l’écume percée
Je ne sais les mots de l’éloge mais le grand souffle de la pente
Je te gravirai sans un cri si je reprends haleine
Je chasserai à la porte ancienne des ombres
Qui captivent mais j’ai l’effroi d’un enfant
Le char de feu laboure ma veine
Je le sais tu te tiens au bord du néant
Tel est le divin qu’il faut le prendre
Pourtant c’est lui qui habite en nous
Son apparition impose de l’implorer
Par où nous entrons à l’unisson de la terre
En un destin
Aussi pouvons-nous dire les images qui le montrent
Nous nous reconnaissons Tel culte fut rendu
Dont nous ne percevons que le fantôme hagard
Comment mortels prenons-nous figure ?
Le dieu sort de la terre mère
Nous l’arrachons de notre vue
Nous nous levons semblables au soleil qui meurt
Et revient Que nous soyons debout dans la lumière
Que nous le supportions c’est que le divin
Nous dresse comme des arbres
Entre néant plus fermement que les montagnes
Pour nous se montre ce qu’il faut voir
A travers la fenêtre tout se dispose
Ainsi que je me reçoive De la couleur
Nous prenons vie non seulement par les yeux
Que nous ayons vue sur la plus simple chose
Est magnificence L’émotion fait dire
Le don des choses et de la langue accouplées
La flèche céleste ouvre le cœur mortel
Au tranchant de l’être
Le long de notre corps goutte le vin
A travers lui le nom du dieu semble
Une reconnaissance maternelle
Nous mourrons femmes et pleurons
Le Sacré est immobile
Si la langue s’éveille aux traces
De la vallée natale
Malheur est le manque du juste mot
Il faut tenir le silence
Qu’en maîtres nous nous présentions
Aux filles de la Mémoire
Quand l’éclat du ciel fauche
La subsistance une grande fragilité
Nous drape A percevoir la racine
Les yeux s’ouvrent démesurément
Au-dessus est tout entier
Souffrance De la déchirure
Vit la simple écoute de la Moire
In, revue « Le Nouveau commerce, N°29, automne 1974 »