Izanne (19? - ) : Lilith. Chant IV
Lilith (Chant IV)
Je suis
l’étoile de la bergère
la louve qui sort de sa tanière
la salive de la rage
la plume dans le goudron
le sable sous les pavés
la foudre sans le tonnerre
la main d’Inanna
l’enfant de la cité d’Akkad
la poussière de Ninsikila
le sein de Marie Magdalène
la reine de Zmargad
la promesse de la moisson
pas la moisson
l’annonce de la mousson
pas la mousson
l’élixir, le poison
et l’antidote
à ma guise
la pâmoison
le mirage de l’extase
la passion de Caïn
et le sang d’Abel
l’égérie des infidèles
le pustule de vos remords
le poison melliflu
les délices démoniaques
le baiser vénéneux
le coït expiatoire
l’épectase des vieillards
l’idole des sybarites
l’opprobre de sa caste
la pythie de l’orgasme
l’incantation des secrets
le vacarme des non-dits
le cratère qui crache la lave
comme le vagin
de l’infertile verse
des larmes de sang
et je défie Moïse
de s’y frayer un chemin
et j’invite à boire
au calice de la création
de la récréation
de la procrastination
à se donner du plaisir
Je suis
l’étrangère impie
qui erre en tenue d’Eve
du côté de la mort
la profanatrice
des alcôves
à la tombée
de la nuit de noces
Dieu a sept noms
moi je suis sept femmes
une pour chacun
de leurs péchés
une pour chacune
des merveilles des sept mondes
et plus encore
Rien n’arrête ce qui n’a pas commencé
rien ne commencera si l’on n’arrête pas
tout continuera juste de recommencer
à proclamer
la victoire par chaos
à venger
les âmes bafouées
à soumettre
les faibles
bannir
les renégats
renier
les bâtards
jeter
les résidus de fausse couche
dans la fulgurance universelle
des béatitudes
des supplices
pour les siècles des siècles
et tandis que chaque parcelle de leur peau
sera fripée, flétrie
attendant le suaire ou la chaux
leur mont de vénus
un terrain vague déserté
je ne prendrai pas une ride
avec un diadème de sperme
sur mes cheveux épars
mes seins pointant vers l’infini
de la jouissance
de la souffrance
et de l’errance entre les deux
Alors dans un dernier souffle
en brisant les miroirs
kaléidoscopes des illusions
et de la vanité
c’est mon nom
qui brûlera vos lèvres
dans l’élan fébrile
d’un dernier baise
Lilith !
Une femme donc volubile
Quand je parle de son talon
Il vient pleurer dans mon giron
Alors je dis qu’il est balaise
Pour le mettre bien à son aise
Il n’a pas une vie facile.
Depuis que l’homme est homme
A lui-même il fait allégeance
Il voit ce qu’il veut dans les runes
La gloire, l’amour et la thune
Depuis que Rome n’est plus Rome
Et pour retrouver sa confiance
Qu’il fume un’ blonde, boiv’ une brune
Sa féminité l’importune.
Parole d’Evangelle
Sans Crispations éditions
22000 Saint-Brieuc, 2022
De la même autrice :Lilith (Chant III) (21/12/2023)