Blas de Otero (1916 – 1979) : Au commencement / En el principio
Au commencement
Si j’ai tout perdu, la vie, le temps,
si j’ai tout jeté, comme un anneau, dans la mer,
si dans les broussailles j’ai perdu la voix,
il me reste la parole.
Si j’ai souffert de la soif et de la faim,
de tout ce qui était mien et dont il ne reste rien,
si j’ai fauché les ombres, en silence,
il me reste la parole.
Si j’ai ouvert les yeux
pour voir le visage pur et terrible
de ma patrie, si j’ai ouvert les lèvres
jusqu’à les déchirer, il me reste la parole.
Traduit de l’espagnol par Jacinto-Luis Guereña
In, « Anthologie bilingue de la poésie espagnole contemporaine »,
Editions Gérard et Cie (Marabout Université), Verviers (Belgique),1969
Du même auteur :
Automne / Otoño (07/11/2020)
Fidélité / Fidelidad (07/11/2021)
En el principo
Si he perdido la vida, el tiempo, todo
lo que tiré, como un anillo, al agua,
si he perdido la voz en la maleza,
me queda la palabra.
Si he sufrido la sed, el hambre, todo
lo que era mío y resultó ser nada,
si he segado las sombras en silencio,
me queda la palabra.
Si abrí los labios para ver el rostro
puro y terrible de mi patria,
si abrí los labios hasta desgarrármelos,
me queda la palabra.
Pido la paz y la palabra
Ediciones Cantalapiedra, Torrelavega, 1955
Poème précédent en espagnol :
Pablo Neruda : « La grande pluie du Sud tombe sur Isla Negra... » / « La gran lluvia del sur cae sobre Isla Negra... » (02/11/2022)
Poème suivant en espagnol :
Miguel D’ors: Pluie / Lluva (21/11/2022)