Johannes Bobrowski (1917 – 1965) : Musique de village / Dorfmusik
Musique de village
Dernier bateau que je prends
sans chapeau sur mes cheveux
blanc dans quatre planches de chêne
avec ma brassée de rue
et tous mes amis autour
l’un soufflant dans la trompette
et l’autre dans le buccin.
Bateau ne me sois pas trop lourd
écoute les autres parlent fort :
tel a construit sur du sable – crie
de l’arbre du puits la corneille,
de l’arbre sans branche crie : malheur !
de l’arbre nu sans écorce :
enlevez-lui son cadeau
prenez son rameau de rue
mais la trompette résonne
mais résonne le buccin
personne ne m’a attrapé
tous disent : il quitte le temps
et ne s’en va pas bien loin
Donc je le sais et je pars
sans chapeau sur mes cheveux
lueur de lune sur barbe et sourcil
ayant vécu, épuisé toute moquerie
j’écoute un coup aussi là-haut
car la trompette retentit
car retentit le buccin
et la corneille crie de loin
je suis là où je suis : dans le sable,
mon brin de rue dans la main
Traduit de l’allemand par Jean-Pierre Lefebvre
In, « Anthologie bilingue de la poésie allemande »
Editions Gallimard (La Pléiade), 1995
Du même auteur : Tour de voiture / Wagenfahrt (26/04/2020)
Dorfmusik
Letztes Boot darin ich fahr
keinen Hut mehr auf dem Haar
in vier Eichenbrettern weiß
mit der Handvoll Rautenreis
meine Freunde gehn umher
einer bläst auf der Trompete
einer bläst auf der Posaune
Boot werd mir nicht überschwer
hör die andern reden laut :
dieser hat auf Sand gebaut
Ruft vom Brunnenbaum die Krähe
von dem ästelosen : wehe
von dem kahlen ohne Rinde :
nehmt ihm ab das Angebinde
nehmt ihm fort den Rautenast
doch es schallet die Trompete
doch es schallet die Posaune
keiner hat mich angefaßt
alle sagen : aus der Zeit
fährt er und er hats nicht weit
Also weiß ichs und ich fahr
keinen Hut mehr auf dem Haar
Mondenlicht um Brau und Bart
abgelebt zuendgenarrt
lausch auch einmal in die Höhe
denn es tönet die Trompete
denn es tönet die Posaune
und von weitem ruft die Krähe
ich bin wo ich bin : im Sand
mit der Raute in der Hand
Sarmatische Zeit
Deutsche Verlags-Anstalt, Stuttgart (Allemagne), 1961
Poème précédent en allemand :
Peter Huchel : Znorovy (16/04/2021)
Poème suivant en allemand :
Heinrich Heine : Les tisserands de Silésie /Die schlesischen Weber (16/06/2021)