Peter Huchel (1903 – 1981) : Le moissonneur polonais / Der polnische schnitter
Le moissonneur polonais
Ne te plains pas, crapaud aux yeux d’or,
dans l’eau pleine d’algues de l’étang.
La nuit, le ciel murmure
comme un grand coquillage.
Son murmure m’appelle à rentrer.
La faux sur l’épaule
je gravis la chaussée claire
entouré par l’aboiement des chiens,
et passe devant la forge charbonneuse
où dort, sombre, l’enclume.
Dehors, dans la dépendance,
les peupliers nagent
dans la lumière laiteuse de la lune.
Les champs respirent encore chaud
dans le cri des grillons.
Ô feu de la terre,
mon cœur contient une autre ardeur.
Je fauchais champ après champ,
aucune tige n’était mienne.
Tempête d’automne, soufflez !
Sur des sols vides
se réveillent les dormeurs affamés .
Je ne longe pas seul
la chaussée claire.
Au bord de la nuit
Les étoiles luisent
comme le blé dans l’aire,
je rentre au pays d’est
dans les lueurs du matin.
Traduit de l’allemand par Emmanuel Moses
In, Peter Huchel : « La tristesse est inhabitable »
Editions de La Différence (Orphée), 1990
Du même auteur :
Exil (16/04/2015)
Ferme Thomasset (16/04/2016)
« Sous la houe brillante de la lune… » / Unter der blanken Hacke des Monds… » (16/0420/17)
Origine / Herkunft (16/04/2018)
Le tombeau d’Ulysse / Das Grab des Odysseus (16/04/2019)
Znorovy (16/04/2021)
Île du sud / Südliche insel (16/04/2022)
Eté écossais / Schottischer Sommer (16/04/2023)
Monnaie de Bir-El-Abbas / Münze aus Bir El Abbas (16/04/2024)
Der polnische schnitter
Klag nicht, goldäugige Unke,
im algigen Wasser des Teichs.
Wie eine grosse Muschel
rauscht der Himmel nachts.
Sein Rauschen ruft mich heim.
Geschultert die Sense
geh ich hinab die helle Chaussee,
umheult von Hunden,
vorbei an russiger Schmiede,
wo dunkel der Amboss schläft.
Draussen am Vorwerk
schwimmen die Pappeln
im milchigen Licht des Mondes.
Noch atmen die Felder heiss
um Schrei der Grillen.
O Feuer der Erde,
mein Herz hält andere Glut.
Acker um Acker mähte ich,
kein Halm war mei eigen.
Herbstürme, weht !
Auf leeren Böden
werden die hungrigen Schläfer wach.
Ich geh nicht allein
die helle Chaussee.
Am Rand der Nacht
schimmern die Sterne
wie Korn auf der Tenne,
kehre ich heim ins östliche Land,
in die Röte des Morgens.
Gedichte
Aufbau Verlag, Berlin (RDA), 1948
Poème précédent en allemand :
Eric Arendt: Le cimetière juif de Prague /Prager Judenfriedhof (17/02/2020)
Poème suivant en allemand :
Johannes Bobrowski : Tour de voiture / Wagenfahrt (26/04/2020)