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Le bar à poèmes
8 avril 2019

Rutebeuf (1230 – 1285) : Le dit des ribauds de grève / le diz des ribaux de greive

 

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 Le dit des ribauds de Grève (1)

 

Ribauds, vous êtes bien à l’aise

les arbres dépouillent leurs branches

et vous n’avez aucun habit,

vous en aurez froid à vos hanches.

Qu’ils vous serviraient, les pourpoints

et les surcots fourrés à manche !

Vous allez en été si vifs

et en hiver si engourdis !

Vos souliers n’ont besoin de graisse :

vos talons, ce sont vos semelles.

Vous ont piqués, les noires mouches ;

maintenant piqueront les blanches (2).

 

(1) : C’est sur la place de Grève, aujourd’hui place de l’Hôtel de Ville, que l’on déchargeait les bateaux.

Les ouvriers y venaient chercher de l’embauche.

(2) : Les flocons de neige

 

Traduit du vieux français par Serge Wellens

in, Revue « Poésie 1, N°7 »

Librairie Saint-Germain-des-Prés, éditeur, 1969

 

Le dit des ribauds de grève

 

Ribauds, vous voilà mal en point :

Chaque arbre a dépouillé ses branches

Et vous de robe n’avez-point :

Le froid va vous mordre les hanches.

Il vous faudrait de bons pourpoints,

De bons surcots fourrés à manches !

L’été, vous gambadez si bien

Mais l’hiver le jarret vous flanche.

Cirer vos souliers, nul besoin :

Vos talons sont durs comme planches.

Les mouches noires vous ont points

Et bientôt vous poindront les blanches ;

 

Traduction de Françoise Morvan

In, Rutebeuf : « Le dit de la grièche d’hiver

et autres poèmes de l’infortune »

Editions Mesures, 2023

Du même auteur :

La grièche d’hiver  (08/04/20)

La grièche d’été / La griesche d'este (08/04/2021)

La pauvreté Rutebeuf / La povreté Rutebeuf (08/04/2022)

Le mariage Rutebeuf f (08/04/2023)

La complainte Rutebeuf  (1et 2) (08/04/2024)

 

Le diz des ribaux de greive

 

Ribaut, or estes-vos à point :

Li aubre despoillent lor branches

Et vos n’aveiz de robe point ;

Si en avreiz froit à voz hanches,

Queil vos fussent or li porpoint

Et li seurquot forrei à manches !

Vos aleiz en estei si joint,

Et en yver aleiz si cranche !

Vostre soleir n’ont mestier d’oint :

Vos faites de vos talons planches.

Les noires mouches vos ont point,

Or vos repoinderont les blanches

 

Commentaires
H
Que de poésie en pays de l'aigre bise de l'hivers !
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