Vassili Joukovski / Василий Андреевич Жуковский (1783 – 1852) : A K.M.S.
A K.M. S. (*)
De nos plaisirs passés nous avons vu la fin,
Mais pour le cœur en deuil, le deuil même est un baume.
Quoi ? Tout n’est donc qu’un rêve et nos pleurs seraient vains ?
Et notre pauvre vie ne serait qu’un fantôme ?
Qu’un chemin tortueux pour mener au néant ?
Non, c’est le désespoir qui n’est qu’errance vaine.
Je sais un havre sûr, une rive sereine
Où tout notre passé nous adviendra vivant ;
Cette invisible Main qui protège nos têtes
Par des chemins divers dans une seule quête
Nous guide, le bonheur. Quand verrons-nous le but ?
Cela, Dieu seul le sait, sa haute Providence.
Mais nous soupirons, légers, le jour venu,
Car nous avons reçu le don de l’Espérance.
1803
(*) Le poème est adressé à Katérina Mikhaïlova Sokovnina, la fiancée d’Andreï Tourguéniev,
qui venait de mourir.
Traduit du russe par André Markowicz,
In, « Le soleil d’Alexandre. Le cercle de Pouchkine 1802 – 1841 »
Actes Sud, éditeur,2011