Jan Zahradníček (1905 -1960) : Autrefois
Autrefois
Autrefois
où si passionnément nous jetions les mots ces dés
excités impatients
de savoir comment le poème allait finir
chaque fois on ne sait quelle gloire se dévoila pour nous
un pan du réel
et nous entrevîmes le futur guerroyant
Mais en somme personne n’en tenait pas plus compte
que d’un rêve confus vers l’aube
ou d’un tonnerre lointain
Les maisons demeuraient debout et les gens se promenaient
Du lundi au samedi le temps tant bien que mal passait toujours
Il y avait toujours des avances où tant bien que mal on pouvait prélever
un peu d’argent
Le temps s’étalait à perte de vue
de même que le vin
Et tandis que nous siégions ainsi
quelqu’un dans notre dos a entrepris de mettre le monde sens dessus
dessous
comme les serveurs mettent les chaises sur les tables quand la nuit se
termine
agitant une serpillière humide
et aérant la salle
Parmi les mégots
les auspices commençaient à se réaliser effroyablement
La lumière depuis transperce sans pitié le fond de la nuit
Malgré les impénétrables ténèbres tout est révélé
sous terre comme aux étoiles tout se trouve prêt
pour le grand avènement
Traduit du tchèque par Petr Král
In, « Anthologie de la poésie tchèque contemporaine, 1945 – 2000 »
Editions Gallimard (Poésie), 2002
Du même auteur : Lettre à ma femme (14/10/2017)