Mohammed Dib (1920 – 2003) : Etranger
Etranger
Si ce n’est pas ce froid, qu’est-ce qui me signale ?
Le rêve mal dissous, l’ombre noire et la voix
Qui font pleurer l’enfant, ou la brume hivernale ?
C’est moi…moi, l’importun qui vous barre la voie.
Je ne suis mort ni vif, ailleurs est mon domaine.
L’enfer du ferrailleur est moins que moi rongé,
Moins diffus le retour inquiet d’une âme en peine ;
Le regard qu’on lui jette éloigne l’étranger.
Il est une pâleur, il est une couleur
Et sombre et claire, un jour vague entre chien et loup :
Le croirez-vous, je suis fait de cette douleur.
Je viens d’ailleurs, que vaut l’objet qu’on porte au clou ?
Et voici que grandit en moi l’incertitude,
Que s’approfondit plus encor ma solitude.
Ombre gardienne
Editions de la Différence, 2003
Du même auteur : Sur la terre, errante (12/08/10/2019)