Michel Houellebecq (1956 -) : Le train de Crécy-la-Chapelle
ichelichel HouelleichMichel Houellebecq en Espagne, septembre 2019 © REX/SIPA
ichel Houellebecq en EspagnMic2019 © REX/SIP
Le train de Crécy-la-Chapelle
J'aimerais bien avoir quelques contemporains
Quand l'insomnie creuse mes nuits, parfois, très tard ;
J'aimerais tellement rencontrer des regards,
Parler avec des gens comme on parle aux humains.
Muré dans ma méfiance et ma timidité,
La nuit semble si longue à mon cerveau malade
J'aimerais bien parfois avoir des camarades,
On me dit que je perds mes meilleures années.
Ah ! ces adolescentes que je n'ai pas aimées
Quand je prenais le train de Crécy-la-Chapelle
Le samedi midi, revenant du lycée ;
Je les voyais bouger et je les trouvais belles.
Je sentais battre en moi un monde de désirs
Et le samedi soir je regardais ma gueule ;
Je n'osais pas danser, je n'osais pas partir,
Personne ne m'embrassait. Je me sentais bien seul.
Je me méprisais tant que je voulais mourir,
Ou vivre des moments forts et exceptionnels ;
Aujourd'hui je m'efforce à ne pas trop souffrir,
J'approche de la fin. Je rejoins le réel.
Rester vivant suivi de La poursuite du bonheur
Editions Flammarion, 1997
Du même auteur :
« Est-il vrai … » (06/10/2014)
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