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Le bar à poèmes
6 octobre 2018

Michel Houellebecq (1956 -) : Différenciation rue d’Avron

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Différenciation rue d’Avron

 

Les débris de la vie s’étalent sur la table :

Un paquet de mouchoirs à moitié entamé,

Un peu de désespoir et le double des clés ;

Je me souviens que tu étais très désirable.

 

Le dimanche étendait son voile un peu gluant

Sur les boutiques à frites et les bistrots à nègres ;

Pendant quelques minutes nous marchions, presque allègres

Et puis nous rentrions pour ne plus voir les gens

 

Et pour nous regarder pendant des heures entières ;

Tu dénudais ton corps devant le lavabo

Ton visage se ridait mais ton corps restait beau

Tu me disais : « Regarde-moi. Je suis entière,

 

Mes bras sont attachés à mon torse, et la mort

Ne prendra pas mes yeux comme ceux de mon frère,

Tu m’as fait découvrir le sens de la prière,

Regarde-moi, regarde. Mets tes yeux sur mon corps. »

 

Le sens du combat

Editions Flammarion, 1996

Du même auteur :

 « Est-il vrai … » (06/10/2014)

Fin de soirée (06/10/2015)

« Mon corps est comme un sac… » (06/10/2016)

« Le jour monte et grandit… » (06/10/2017)

Le train de Crécy-la-Chapelle (22/12/2023)

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