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Le bar à poèmes
13 janvier 2024

Yves Prié (1959 -) : Le désir d’une île

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Le désir d’une île

 

En quel temps sommes-nous ?

Entre ombre et soleil

quel espace pour nos rêves ?

 

 

L’ancre lancée dans la nuit

fixe enfin à une autre rive

le nœud incandescent

de l’angoisse

 

Seul l’agite

le bruissement des saules

 

 

L’île connaît le poids

de ses pierres

 

Par leur débauche de couleurs

elles inscrivent

la violence de son émergence

 

 

Dans la faille

brisée du jour

elles meurent

de leur dernier éclat

 

 

Je dirai le monde

je révèlerai le soleil noir

qui ronge les marées

l’orange amère des nostalgies

et la solitude de l’oiseau

dans son vol

 

Je dirai l’instant

où le rivage disparaît

dans l’à-pic d’une falaise

 

L’instant où le monde

nous abandonne

dans la furie d’une vague

espérant le gouffre

 

 

Rejoindre la haute mer.

Là-bas nous abandonnons

les repères

livrés aux seuls hasards

du vent

 

Nul amer pour indiquer

le chemin

 

Toutes frontières abolies

nous nous fondons

dans l’espace

l’œil attiré par des astres

éphémères

 

 

Nous serons là

au creux des plis de la terre

 

Le soir se recueille

dans l’écho des tempêtes

 

Nous serons veilleurs

simples figurants

d’un monde qui nous échappe

 

Notre regard s’éteint

dans l’horizon

que le murmure

de notre passage

livre à l’espace

immobile

 

Oserons-nous nous confronter

dans une lutte désespérée

avec les démons

inventés dans les hauts-fonds

 

 

 

Un vent de sable

brouille le regard

et poursuit

le lent travail de l’oubli

 

*

 

Entre terre et mer

dans un ailleurs indéfini

l’espace nous abandonne

se referme en ses démons

 

Seule la lumière

caresse le dos des herbes

répliques apaisées de la vague

 

 

Il reste une ombre

une menace

qui guette nos enthousiasmes

 

Le monde serait-il clos

dans un visage

que la pierre transpire

 

 

 

Nous ne serons rien

dans ces remous

 

Brins d’algues

éclatés au front de la pierre

 

Le temps s’allège de nous

 

 

Je ne sais plus

où la terre

où la mer

 

Sombre renaissance

d’un monde condamné

à la foudre

aux battements chaotiques

des laves

 

Il nous reste à inventer

l’au-delà des séismes

 

 

Le désir est une plage

qui s’égare

dans le secret des failles

 

 

Carnets de l’île et autres poèmes

Editions Rougerie, 87220, Mortemart,2021

Du même auteur :

Esquisses pour un hiver (09/03/2016) 

Glanes (10/03/2017)

« Ce fut une longue attente… » (10/03/2018)

« Que nous soient rendues... » (14/01/2020)

« Fumées lentes sous la nuit... » (14/01/2021)

Passage des amers (14/01/2022)

L’atelier du peintre (14/01/2023)

Rumeurs du temps – Mélancolies (14/01/2025)

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