José Manuel Caballero Bonald (1926 -2021) : Anamorphose / Anamorfosis
Anamorphose
Cette odeur de chicorée et de marc,
de crins de cheval et de vert-de-gris
avec salpêtre, et d’herbe de mon enfance
en face de l’Afrique, contribuera
peut-être à perpétuer
dans je ne sais quel recoin du souvenir
un test équivoque
d’amour dilapidé et d’injustice
que j’ai contre moi-même,
et c’est comme si tout à coup
le flux continu et furtif du passé
transformait en routine
la mémoire que j’ai de demain.
Traduit de l’espagnol par Claude de Frayssinet
In, « Poésie espagnole. Anthologie 1945 – 1990, »
Actes Sud / Editions Unesco, 1995
Du même auteur :
Verset de la genèse / Versículos del génesis (21/0720/15)
Ma prophétie, c’est ma mémoire / Mi propia profecía es mi memoria (10/07/2016)
Un livre, un verre, rien. / Un libro, un vaso, nada (10/07/2017)
Tandis que j’ajuste mon âge au temps (10/07/2018)
Pas aujourd’hui / Hoy no (10/07/2019)
Cinématographe (10/07/20)
Survie / Supervivencia (10/08/2021)
Transfiguration de la perte / Transfiguración de lo perdido (09/07/2022)
Anamorfosis
Este olor a achicoria y a orujo
y a crines de caballos y a verdín
con salitre y a yerba de mi infancia
frente a África, acaso
contribuya también a perpetuar
en no sé qué recodo del recuerdo
un equívoco lastre
de amor dilapidado y de injusticia
que en contra de mí mismo cometí,
y es como si de pronto
todo el furtivo flujo del pretérito
convirtiera en rutina
la memoria que tengo de mañana.
Descrédito del héroe
Editorial Lumen, Baecelona, 1977
Poème précédent en espagnol :
Miguel de Unamuno : « Que je meure les yeux ouverts... » / « ¡Logre morir con los ojos abiertos…” (06/07/2023)
Poème suivant en espagnol :
Luis Mizón : Le songe du figuier en flammes (II) / El sueño de la higuera en llamas (II-III)) (05/08/2023)