Ibn Al- Dja’bari (? – 1241) : L’Unique
L’Unique
L’aube est passée,
et celui qui T’aime est encore là,
versant des larmes,
ô Toi pour qui ma mort
dans la soif de Son amour
est aussi ma vie.
Tu m’as fait boire une gorgée
dans la coupe de Ton amour,
Ivre de Lui,
ma mort en Lui est devenu délices.
Ô mon Bien-Aimé,
le psalte a chanté les litanies
de Tes différents Noms,
et dans la douceur des chants
l’émotion m’a ravi.
Mon âme s’est tendue vers l’Unique,
agréable est mon tourment,
et, du plus profond de mon cœur,
montent les soupirs.
Toi qui me blâmes de tant souffrir,
modèle ton zèle à me blâmer,
car en Lui,
agréable est mon déchirement,
agréable est cette douleur
qui naît de la séparation.
Car, du baume de Ses paroles
Il a poli mon cœur,
à tel point que mon être
s’est fait miroir limpide
de Son amour.
C’est à vous, ô mes seigneurs,
c’est par vous,
c’est par votre mérite
et votre beauté
que la flamme de ma lampe
a jeté son éclat.
Avant même que Tu rassembles
les parties de mon être,
Tu m’as fait entendre
Tes paroles.
Avant même que Tu me places
au centre
des six lieux de l’espace,
oui, certes, au centre
de tous les lieux qui m’environnent !
J’ai témoigné
qu’Il est l’Unique,
après avoir considéré
Sa perfection
et les effets de Sa bonté
dans tous les états
où je me suis trouvé.
J’ai frappé à Ta porte
ô Seigneur mien,
à cause de ma misère.
Que de mendiants qui frappent
eux aussi à Ta porte
as-tu enrichi de Tes dons,
en exauçant ma prière !
Traduit de l’arabe par René R. Khawam
in, « La poésie arabe des origines à nos jours »
Editions Phébus, 1995
Du même auteur : Nuit de joie (21/09/2023)