Louis-Philippe Dalembert (1962 -) : « L’étranger en route sur la terre... »
L’étranger en route sur la terre
affronte seul la bête immonde
gladiateur d’un autre temps
nulle règle ne lui est concédée
nul arbitre nulle gloire non plus
à moins d’en être l’absolu vainqueur
et dans l’arène offerte
aux huées de la meute
sept fois il tombe
l’espoir en miettes
sept fois il se relève
L’étranger en marche sur la terre
porte sa dissemblance
en bandoulière
d’instinct on s’en méfie
de sa manière de se lever
ou d’enraciner le coude dans la table
de ses mots titubants
de ses rires décalés,
d’instinct on s’en méfie
on se cuirasse
à l’avancée de ses pas
qui ne savent la bonne distance
ni le moment idoine
on se cuirasse à l’approche de ses bras
confondant une étreinte et une poignée de mains
la bienséance et la camaraderie
un verre de vin et la fraternité
de ses baisers à pleines lèvres
qui ignorent la part de l’air et des joues
L’étranger en marche sur la terre
n’est pas un ami
ni même un voisin
avec lequel on partage
les humeurs du temps
moins encore une mauvaise nouvelle
quand la santé défaille
ou que la mort tonitrue à sa porte
(L’étranger en marche sur la terre)
Transhumances
Riveneuve éditions, 2010
Du même auteur : Voyage (29/07/2022)