Michel Baglin (1950 – 2019) : Ombres rustiques
Ombres rustiques
Il y aurait une maison de campagne,
des objets rugueux et des êtres de bois
tendre. Un arrière-pays d’odeurs paisibles
dans le bruit des gestes besogneux...
Il n’y a qu’une composition, pourtant.
Une lumière de pleine terre sur la gouache
d’un torchis.
Des mains ont disposé quatre noix,
une cruche et la tresse d’aulx dans
la communion silencieuse des clartés,
le recueillement des ombres rustiques.
Des mains ont obéi aux vœux des yeux
pour nouer les reflets des matières
et les échos du sensible.
Alors la nature morte accueille l’évidence
du monde. Réveille le son mat du grès
contre le bois, le froissement des pelures,
le grelot des noix au cœur sec.
Alors un clou oubliée épingle le soleil
sur la blancheur avide du plâtre,
ancre l’instant à l’éternité du tableau.
Alors la tresse souveraine vient à nous
dans l’espace accompli.
Les chants du regard
Editions Privat, 31000 Toulouse, 2006
Du même auteur :
Frères de Terre (19/09/2017)
De chair et de mot (30/01/2020)