Georges Perros (1923 – 1978) : « Cette légère envie de se saouler... »
Cette légère envie de se saouler
Qui prend l’homme le soir
Après une journée de travail
D’où nous vient-elle
Sinon de ne rien comprendre
Du mouvement absurde
De cette terre
Dont on dit qu’elle bouge,
Immortelle
Alors que c’est nous qui bougeons,
Nous si mortels, si faibles
Si forts quand il s’agit de vivre
Comme refuserait de faire
Un animal
Si faibles quand le moindre choix
Est à décider
C’est que nous sommes en politique
Bien plus qu’en poésie
C’est que nous ne supportons plus d’exister
Si notre voisin d’à côté
Souffle de froid et de la faim
On croirait, à lire les journaux
Que c’est nouveau cela,
Nouveau, ce goût des hommes
De nos frères
N’a-t-on pas toujours tué, meurtri,
Enclouenter sur pilori
Les malheureux qui osaient dire
Que rien n’allait très bien sur terre
Que rien n’irait jamais, tant que
L’homme laisserait faire
La richesse par la misère
Il y a de beaux traités là-dessus
Les hommes ne savent pas sourire
La Joconde n’est qu’un tableau
Qu’on vient regarder, de son haut
En trouvant le mauvais côté
De ce sourire un rien pincé
Perdu dans la nature, derrière
Labyrinthe où perdre son cœur
Mais non sa vie
Le cœur n’a qu’une chose à faire
C’est battre
Le temps qu’il fait dans nos saisons
Le temps qui bat sa déraison
Dans nos humeurs dévastatrices
Œuvres
Editions Gallimard (Quarto),2017
Du même auteur :
« On meurt de rire… » (10/08/2014)
Marines (1) (10/08/2015)
« Les guerres n'est-ce pas... » (16/10/2016)
« Il y a un bruit près de chez moi… » (16/10/2017)
« Il n’y a rien... » (16/10/2018)
« Ces envies de vivre ... » (16/10/2019)
L’âme (16/10/2021)
Huit poèmes (16/10/2022)
Marines (2) (16/10/2023)
« Seul je me sens trop immortel... » (16/10/2024)