Armin Senser (1964 -) : Eglogue / Egloge
Eglogue : Borkum
D’un bout à l’autre l’île est plongée dans le noir.
Contrairement à la vie, au moins toutes les
heures, la vérité revient à la lumière. Pour y parvenir
le chemin consume tout le temps du retour.
Sans cesse le vent secoue toute substantielle chose.
Les traces s’effacent. Le mouvement se réduit –
ou mieux il s’élargit – en changement d’emplacement :
Ici, pour le témoin, être et ne pas être ne font qu’un.
Les dunes ont le cheveu clairsemé. Alors que le quartz
lustre ton amalgame, de son gîte la douleur se lève effrayée
et va rendre l’œil humide. Les dents, du froid
nourries en claquant enlaidissent le torse d’homme.
Parcimonie se nomme la loi du froid. Le trépied laisse
à l’œil le soin de puiser la lumière. Les amorces de mot restent
collées aux pensées. Plus lent est le temps et plus froid il fait donc.
L’éternité se fait ici espace ou bien fournaise insupportable.
Tout corps deviendra tôt ou tard victime du climat.
La seule chose qui encore te surgisse à l’esprit, c’est : un solarium ou
encore le changement de latitude. Mais le mal du pays est nostalgie
du froid ou le désir de porter des lunettes de soleil.
Là-bas ne sera jamais ici. Aucune rue, ni jupe, aucune voix
ne trouve accès à l’ouïe : la coquille pousse vers la pleine mer.
Ce qui sépare l’endroit du corps, gît dans la mémoire du langage.
Comprendre le patois. Comme souvenir, le mélange de l’île n’est pas
idoine. Dans la vie, les rimes sont aussi malsonnantes
que de la langue allemande la moindre divergence.
Traduit de l’allemand par Philipe-Henri Ledru
In, « La poésie allemande contemporaine »
Editions Seghers / Goethe-Institut Inter Nationes, Paris, 2001
Du même auteur : A la mémoire de Joseph Brodsky / Zum Gedenken an Joseph Brodsky (12/10/2021)
Egloge : Borkum
Anfang und Ende der Insel liegen im Dunkeln.
Il Gegensatz zum Leben tritt, wenigstens alle paar
Stunden, die Wahrheit ans Licht. Bis dorthin
verbraucht der Weg die ganze Zeit der Rückkehr.
Unaufhörlich rüttelt dr Wind an allem Handfesten.
Spuren werden verwischt. Bewegung reduziert –
oder besser erweitert sich – zu einem Standortwechsel :
Sein und Nichtsein sind da eins für den Betrachter.
Die Dünen haben schütteres Haar. Während das Quarz
dein Amalgam aufpoliert, schreckt der Schmerz von
seinem Lager un näßt, das Auge. Die Zähne, von Kälte
gespeit, verunstalten klappernd den männlichen Torso
Gesetz der Kälte ist Sparsamkeit. Das Stativ überläßt
seinem Auge, das Licht einzuholen. Wortanfänge bleiben
am Gedanken kleben. Je langsamer die Zeit, desto kälter also.
Ewigkeit wird da zum Raum oder zur unerträglichen Hitze.
Jeder Körper wird früher oder später Opfer des Klimas.
Das einzige, was dir noch einfällt, ist : Ein Solarium oder der
Wechsel des Breitengrades. Aber Heimweh ist Sehnsucht
nach Kälte oder der Wunsch, eine Sonnenbrille zu tragen.
Dort wird nie hier sein. Keine Straße, Rock, keine Stimme
findet Eingang ins Gehör : Die Muschel treibt aufs offene Meer.
Was Ort und Körper trennt, liegt im Gedächtnis der Sprache.
Mundart verstehen. Als Souvenir ist die Inselmischung
ungeeignet. Im Leben sind Reime ebenso fehl am Platz
wie in jedem Derivat des deutschen Sprachschatzes.
Grosses Erwachen
Carl Hauser Verlag, Munich, 1999
Poème précédent en allemand :
Nelly Sachs: « C’est l’heure planétaire des fugitifs... « / « Das ist der Flüchtlinge Planetenstunde... »
Poème suivant en allemand :
WolfdietrichSchnurre : Nouveaux poèmes 1965 – 1979 (III) / Neue Gedichte 1965 – 1979 (III) (28/11/2020)