James Sacré (1939 -) : Paysage au fusil (coeur) une fontaine) (III)
Paysage au fusil (cœur) une fontaine
..................................................................
L’AUTOMNE EN NOUVELLE – ANGLETERRE
L’automne à Framingham aujourd’hui la pluie
Elle vient longuement sur un jardin seul et les pelouses
Est un mélange de banlieue de grands arbres le bruit
De l’autoroute est continu la présence de grands parkings
Jamais loin et l’une après l’autre les maisons
Elles oublient la guerre et la solitude et font semblant
De sourire avec leur pelouse et des couleurs tendres
La mienne aussi pas trop riche pourtant sensible
A pourtant l’automne à ses arbres ils joignent la pluie.
L’automne à Cohasset parmi les érables parmi
Des jolies maisons vieilles et la mer à Cohasset
Il est la saison que je préfère il a des arbres
Rouges parmi le jour et la lumière
Et le temps facile et lent le vert
De son green une maison que je connais
Comme un bateau confortable le bruit
De ses planches un grenier fermé le temps
La bouge à Cohasset parmi depuis longtemps l’automne.
L’automne dans la Nouvelle-Angleterre est-il
Capable d’être un lieu central pour un poème
Une fontaine encore et des couleurs en tout cas
J’y peux marcher parmi les bouleaux les érables
Et tel verger perdu comme un cœur donne des pommes
Dans les bois des oiseaux gelinottes soudaines
Y montrent le bleu déchirure et le silence mais
N’y paraît pas de fontaine aucun village autour
Un vrai silence et comme un lieu vraiment perdu rien
Ne répond sauf plus loin l’autoroute et là
Une carcasse dans l’herbe un camion défoncé.
Il y a pourtant des maisons proches des fermes
Seules et leurs silos des granges rouges
Des propriétés blanches leur pelouse au bord
Des bois désordre et ronces dans les jambes j’y suis
Dans l’automne et la Nouvelle-Angleterre et
Tel silence n’est pas tant solitude il parle
A l’écart de l’autoroute et des maisons neuves
De la beauté de la douleur et de la guerre au loin
Dans le temps l’espace et des pommes elles pourrissent.
Dans l’automne en Nouvelle-Angleterre Amérique
Abandonnée celle que j’aime un pommier perdu
Dans les bois la couleur solitaire des arbres
Au loin l’autoroute et les pelouses propres
Elles joignent pourtant presque désordre le bord des bois
Ca finit par une maison morte écroulée un verger
Délabré je ne comprends pas où le cœur
Quitte la violence et parvient le peut-il
Dans le silence un automne et le rouge ignoré d’une pomme.
Dans la lumière et les consonnes d’un
Dix-sept septembre après-midi après passage
Parmi des arbres des couleurs l’espace et
Parmi des maisons de moins en moins il y a
Le cœur (il est rouge et des pommes tel verger
C’est bien la même fontaine un lieu porté
Dans la lumière et les branchages d’un
Poème après passage en la mémoire et le présent
Parmi les mots pour automne et bonheur bousculés
Pommes tombées retour mais parenthèse oubliée...
OISEAUX QUI SONT DANS LE COEUR DES ARBRES
Ramiers dans les arbres les grands
au fond du dernier pâtis après
les chemins les derniers toits ramiers dans
les branches repos ils
y sont restés (peut-être) pourtant
combien de fusils tant de poèmes pourtant
les tracteurs les remembrements pourtant
dans les arbres toujours et ce mot ramier
(piège ou rien ?) dans ramure ou poème.
Pigeon plumes dans le centre du cœur
des arbres (grands chênes dans les bas)
ils sont arrivés par bande un soir
l’automne il pleut mais plumes chaudes cœur
balancé branches le temps le porte dans la pluie
le temps l’emporte un fusil braconnier tard
il revient tard et des oiseaux dans
son paletot mouillé l’automne il pleut longtemps.
Tel paysage que les mots pierres sèches buissons le désordre vont dire soleil
presque le soir et de souvenirs mais si pauvres dans la rouille un vieux toit de
cabane un coteau je veux le voir faut-il passer par ce poème ou quel silence ?
C’est un peu que je voudrais le bleu village oublié d’herbe et la lumière elle
m’emporte un automne et des perdrix (graines barbues, taupinières) dans un
pré clos poème la nostalgie (peut-être) plutôt rien le temps permet que j’en
parle du silence et le paysage est creux – mais toujours : je saute (ou l’échalis,
perches pelées) à la ligne.
(Tourterelle un cœur d’été l’avait entendue il fallait quitter les chemins pour
l’herbe et le ciel son bruit de cœur allait montrer les arbres dans l’infini silence
de la saison il semble que ce bonheur était désormais (merveille insignifiance)
le rouge qui envahit les joues.)
Lieux, mots que mon père m’a dits (fontaine et fusil). J’aimerais savoir
qu’ils sont la violence et la tendresse de sa queue. De la mienne. Pour ne pas
devoir m’inquiéter de souvenirs et de poèmes qui seraient vides.
Fusils longtemps silencieux soudain l’automne est rouge autour d’eux. La
peur et le bonheur sont ensemble au bord des buissons. Je me souviens des
visages que j’aime. Il n’y a pas besoin de fusil pour mourir.
A force dans simulé mais réel phrase inutile ce désordre où les mots les
oiseaux d’en parler que je poursuis mais pas tant vraiment quelles fêtes ce
paysage et démêler où l’herbe griffe les jambes aussi cruellement bleus et
doux que ces mots le ciel creux dans les épines : je vous aime.
Peut-être la lumière y est rêvée la parmi couleur des prés les buissons que
n’est dans les mots pris syntaxe ou ronce de ce poème que sachant cela le
plaisir s’achèvera déplié comme le bleu le vent l’apporte au soudain centre des
épines déchiré mais sourire et même que rien n’y soit
............................................................................................................................
Paysage au fusil (coeur) une fontaine
In, « Cahiers de poésie, 2 »
Editions Gallimard, 1976
Du même auteur :
Trois figures qui bougent un peu (19/03/2015)
Presque rien à Sidi Slimane, le temps qui vient (07/06/2018)
Paysage au fusil (coeur) une fontaine) (I) (07/06/2019)
Paysage au fusil (coeur) une fontaine) (II) (02/12/2019)
Paysage au fusil (coeur) une fontaine) (IV) (07/06/2021)
« Parfois l’âne arrive... » (07/06/2022)
Deux rushes de quinze vers chacun (07/06/2023)
Le mot folie n’est qu’un mot, dans le poème (07/06/2024)