Francisco Brines (1932 -) : « Le balcon donne sur le jardin... » / « El balcón da al jardín... »
Le balcon donne sur le jardin. Les murs bas
et harmonieux. Le grand portail fermé.
Un homme entre sans lumière, il écrase
les buissons de jasmins, ses pieds
gémissent, il ne regarde rien. Septembre
recouvre la terre, de lents nards montent
et les pigeons élèvent de leurs ailes
l’air, le soleil, et la mer repose tout près.
Le vent ne brûle plus. Dans ses pas, l’eau
arrose lentement l’alentour, les seringas
s’offrent en chœur. Les insectes grimpent
pour vivre sur les feuilles. Une barbe
repose sur sa poitrine, il poursuit sa marche
dans le noir. Il sème la mort, oiseaux
noirs dans le ciel, feuilles qui tombent,
et l’eau qui reste figée dans la glace.
Le jardin est misérable, et l’absence
l’habite déjà comme s’il s’agissait
d’un cœur... terre jadis verdoyante.
Il passe la petite porte. Des hurlements
viennent de la campagne, et une ombre froide
pénètre sur le balcon, c’est un souffle
de mort puissante. C’est la maison
qui peu à peu s’écroule, humide et solitaire.
Traduit de l’espagnol par Claude de Freyssinet
In, « Poésie espagnole. Anthologie 1945 – 1990 »
Actes Sud / Editions Unesco, 1995
Du même auteur :
Se regardant dans la fumée / Mirándose en el humo (11/05/2017)
Quand je suis encore la vie / cuando yo aún soy la vida.(11/05/2018)
Le pacte qui me reste (11/05/2019)
Scène secrète (11/05/2021)
Vers épiques / Versos épicos (11/05/2022)
L’œil solitaire de la nuit (11/05/2023)
Epiphanie romaine (11/05/2024)
El balcón da al jardín. Las tapias bajas
y gratas. Entornada la gran verja.
Entra un hombre sin luz y va pisando
los matorrales de jazmín, le gimen
los pies, no mira nada. Qué septiembre
cubre la tierra, lentos nardos suben,
y suben las palomas con las alas
el aire, el sol, y el mar descansa cerca.
El viento ya no quema. Riegan lentos
los pasos que da el agua, las celindas
todas se entregan. Los insectos se alzan
a vivir por las hojas. En el pecho
le descansan las barbas, sigue andando
sin luz. Todo lo deja muerto, negras
aves del cielo, caedizas hojas,
y cortada en el hielo queda el agua.
El jardín está mísero, y habita
ya la ausencia como si se tratase
de un corazón, y era una tierra verde.
Cruza la diminuta puerta. Llegan
del campo aullidos, y una sombra fría
penetra en el balcón y es un aliento
de muerte poderoso. Es la casa
que se empieza a caer, húmeda y sola.
Las brasas
Ediciones Rialp (Adonais), Madrid, 1960
Poème précédent en espagnol :
Antonio Colinas : Lumières de printemps / Luces de primavera (02/03/2020)
Poème suivant en espagnol :
Óscar Arturo Hahn : Le corps interroge l’âme / El cuerpo le pregunta al alma (29/05/2020)