Nikolaï Alekseïevitch Nekrassov / Николай Алексеевич Некрасов (1821 – 1877) : « Peux-tu nommer, ô ma terre natale… »
Peux-tu nommer, ô ma terre natale,
Un seul pays ou bien un seul séjour
Où ton semeur, sentinelle loyale,
Où ton moujik ne gémisse toujours ?
Il gémit en prison, au bagne,
Il gémit aux champs, aux bois verts,
Dormant sous son char en plein air,
Sur les durs chemins des campagnes.
Il gémit dans mille bourgades,
Dans les tribunaux et conseils,
Sans même jouir du soleil
Dans son isba pauvre et maussade.
Entends-tu ses gémissements
Sur la Volga, grand fleuve russe ?
Ce sont les haleurs qui les poussent
Et nous nommons leurs plaintes un chant.
Vaste Volga, quand sur la plaine
Tu répands tes eaux printanières,
Plus vaste que toi sourd la peine
Du peuple russe sur sa terre.
Quand donc se lèvera-t-il, quand ?
Que veut dire sa plainte amère ?
Ou bien au sort obéissant,
Ayant chanté ce triste chant,
S’endormira-t-il sur sa terre ?
1857
Traduit du russe par Katia Granoff
in, "Anthologie de la poésie russe"
Editions Gallimard (Poésie), 1993
Du même auteur :
« Est-ce le vent au fond des bois ?... » (06/01/2018)
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