Jakez Riou (1899 – 1937) : La fontaine noire / Ar feunteun zu
La fontaine noire
L’eau lente
tombe,
goutte après goutte,
le long de la fougère.
Silencieuse et nonchalante
l’eau sourd
du flanc de la vallée ;
depuis des siècles
ses gouttes, toujours, toujours,
tombent du cœur de la roche.
Nuit et jour,
le long de la fougère,
goutte après goutte,
lente.
Sans aucun bruit,
elle tombe
le long de la fougère,
dans un creux si profond qu’on ne la voit pas.
Mais comment se fit-il,
que dans ma solitude,
je restai jusqu’au soir
à regarder, angoissé,
cette eau s’écoulant
goutte après goutte ?
Et quand vint la nuit,
j’entendis la roche saigner
le long de la longue fougère,
goutte après goutte,
lentement,
dans le calice
de la nuit.
Traduit du breton par Alain Le Berre,
Revue « Vagabondages, N° 36, Février 1982 »
Librairie Séguier,1981
Ar feunteun zu
An dour a gouezh,
goustad,
berad ha berad,
a-hed ar raden gouez.
Didrouz ha lizidour
e virbilh an dour
diouzh gorre ar bantenn ;
abaoe kantvedoù
e kouezh a veradoù
ingal, ingal, diouzh kalon ar garregenn.
Noz ha deiz,
a-hed ar raden leizh,
berad ha berad,
goustad.
Hep trouz ebet
e kouezh
a-hed a raden gouez,
en un naoz re zon evit bezañ gwelet.
Perak avat e c'hoarvezas,
p'edon va-unan,
e chomis betek ma nozas
o sellout, en estrenvan,
ouzh an dour o veradañ ;
ha pa nozas,
e klevis ar garregenn o wadañ,
a-hed ar raden hir,
berad ha berad,
goustad,
e kalir
an noz.
Revue “Gwalarn, N° 66 »,
Brest, 1934
Poème précédent en breton :
Yann Ber Calloc’h: Pour les Trépassé / Eid an enan (19/09/1206)
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