Michel Dugué (1946 - 2024) : « Aucun de nous … »
Aucun de nous
ne tient seul.
Il lui faut outre les os
une parole – fût-elle économe.
Alors le jour contemporain s’éclaire
un peu.
*
Le sol est dur. L’hiver
le baigne d’un soleil
très blanc.
Il est des mots
qu’on aimerait
éprouver ainsi.
Infracassables
après le retrait du poème.
Barques dormantes, elles furent proches
des îles promises quand le rameur
avait la nage sereine.
Savent-elles que l’hiver aura
la corde rude, le mutisme profond
qu’entamera, si peu, le battement des fers
dont les eaux sont chargées ?
Sur le môle : une caisse vide.
Est-elle là pour l’éternité ?
Du rameur ou de l’ange lequel
l’a oubliée ?
L’air, lui, hésite
Entre la pluie et le vent
*
Va, c’est l’heure !
Prends le sac du chiffonnier,
marche au bord de l’océan
à la demeure.
N’aie crainte de ce présent irréfutable
brisé parfois comme poterie sous
la trique de fer.
Accorde-lui l’éclair de la beauté
que tu opposeras au désastre.
Tu vois l’aile du milan
signant dans l’air
une page, un vide où
ne cesse d’affleurer ce qui
n’éclôt pas.
Le jour ne serait, peut-être,
que cela.
Le jour contemporain
Editions Folle Avoine, Bédée (35137), 1999
Du même auteur :
« Mais la douceur s’avoue vivace … » (14/06/2019)
Nocturnes (14/06/2020)