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Le bar à poèmes
18 avril 2025

Cesare Pavese (1908 – 1950) : Travailler fatigue / Lavorare stanca

 

 

Travailler fatigue

 

 

Traverser une rue pour s’enfuir de chez soi


seul un enfant le fait, mais un homme qui erre,


tout le jour, par les rues, ce n’est plus un enfant


et il ne s’enfuit pas de chez lui.

 

 

En été, il y a certains après-midi


où les places elles-mêmes sont vides, offertes


au soleil qui est près du déclin, et cet homme qui vient


le long d’une avenue aux arbres inutiles, s’arrête.


Est-ce la peine d’être seul pour être toujours plus seul ?


On a beau y errer, les places et les rues


sont désertes. Il faudrait arrêter une femme,


lui parler, la convaincre de vivre tous les deux.


Autrement, on se parle tout seul. C’est pour ça que parfois


il y a des ivrognes nocturnes qui viennent vous aborder


et vous racontent les projets de toute une existence.

 

 

Ce n’est sans doute pas en attendant sur la place déserte


qu’on rencontre quelqu’un, mais si on erre dans les rues,


on s’arrête parfois, S’ils étaient deux,


simplement pour marcher dans les rues, le foyer serait là


où serait cette femme et ça vaudrait la peine.


La place dans la nuit redevient déserte


et cet homme qui passe ne voit pas les maisons


entre les lumières inutiles, il ne lève plus les yeux :


il sent seulement le pavé qu’ont posé d’autres hommes


aux mains dures et calleuses comme les siennes.


Ce n’est pas juste de rester sur la place déserte.


Il y a certainement dans la rue une femme


qui, si on l’en priait, donnerait volontiers un foyer.

 

 

 


Traduit de l’italien par Gilles de Van


In, Cesare Pavese : « Travailler fatigue. La mort viendra


et elle aura tes yeux ».


Editions Gallimard, 1969

 


Du même auteur


Paysage (18/04/2016)


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Lavorare stanca

 

 

Traversare una strada per scappare di casa

 

lo fa solo un ragazzo, ma quest’uomo che gira

 

tutto il giorno le strade, non è più un ragazzo

 

 

 

e non scappa di casa.

 

 

                                   Ci sono d’estate

 

pomeriggi che fino le piazze son vuote, distese

 

sotto il sole che sta per calare, e quest’uomo, che giunge

 

per un viale d’inutili piante, si ferma.

 

Val la pena esser solo, per essere sempre più solo?

 

Solamente girarle, le piazze e le strade

 

sono vuote. Bisogna fermare una donna

 

e parlarle e deciderla a vivere insieme.

 

Altrimenti, uno parla da solo. È per questo che a volte

 

c’è lo sbronzo notturno che attacca discorsi

 

e racconta i progetti di tutta la vita.

 

 


Non è certo attendendo nella piazza deserta

 

che s’incontra qualcuno, ma chi gira le strade

 

si sofferma ogni tanto. Se fossero in due,

 

anche andando per strada, la casa sarebbe

 

dove c’è quella donna e varrebbe la pena.

 

Nella notte la piazza ritorna deserta

 

e quest’uomo, che passa, non vede le case

 

tra le inutili luci, non leva più gli occhi:

 

sente solo il selciato, che han fatto altri uomini

 

dalle mani indurite, come sono le sue.

 

Non è giusto restare sulla piazza deserta.

 

Ci sarà certamente quella donna per strada

 

che, pregata, vorrebbe dar mano alla casa.

 

 

Poème précédent en italien :


Salvatore Quasimodo : Plainte pour le Sud / Lamento per il Sud (15/04/25)

 

Poème suivant en italien :


Jacopo Sannazaro  : « Icare chut ici... » / « Icaro cadde qui... » (11/06/2025
 

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