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Le bar à poèmes
29 septembre 2024

Georges Bataille (1897 – 1962) : « La nuit est ma nudité... »

 

La nuit est ma nudité

les étoiles sont mes dents

je me jette chez les morts

habillé de blanc soleil.

 

La mort habite mon cœur

comme une petite veuve

elle sanglote elle est lâche

j’ai peur je pourrais vomir

la veuve rit jusqu’au ciel

et déchire les oiseaux.

..............................................

A ma mort

les dents de chevaux des étoiles

hennissent de rire je mords

 

mort rase

tombe humide

soleil manchot

 

le fossoyeur à dents de mort

m’efface

 

l’ange au vol de corbeau

crie

          gloire à toi

          je suis le vide des cercueils

          et l’absence de toi

          dans l’univers entier

 

          les trompes de la joie

          sonnent intensément

          et le blanc du ciel éclate

 

          le tonnerre de la mort

          emplit l’univers

 

          trop de joie

          retourne les ongles.

.

          J’imagine

          dans la profondeur infinie

          l’étendue déserte

          différente du ciel que je vois

          ne contenant plus ces points de lumière qui vacillent

          mais des torrents de flammes

          plus grands que le ciel

          plus aveuglants que l’aube

 

          abstraction informe

          zébrée de cassures

          amoncellement

          d’inanités d’oublis

 

          d’un côté le sujet JE

          et de l’autre l’objet

          univers charpie de notions mortes

          où JE jette en pleurant les détritus

          les impuissances

          les hoquets

          les discordants cris de coq des idées

 

          ô néant fabriqué

          dans l’usine de la vanité infinie

          comme une caisse de dents fausses

 

          JE penché sur la caisse

          JE ai

          mon envie de vomir envie

 

          ô faillite

          extase dont je dors

          quand je crie

          toi qui es et seras

          quand je ne serai plus

          X sourd

          maillet géant

          brisant ma tête.

 

          Le scintillement

          le haut du ciel

          la terre

          et moi.

 

          Mon cœur te crache étoile

          incomparable angoisse

          je me ris mais j’ai froid

 

                                                                 (Je me jette chez les morts)

 

 

L’Orestie

Editions des Quatre-Vents, 1945

Du même auteur : « Le néant n’est que moi-même... » (09/102018)

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