Kamal Ibrahim (1942 - 2021) : Ventre articulé
Ventre articulé
Je mets mon corps en silence
Je croise ma mort dans le bruit
Comme le vent je songe mes organes
Je verse mon cri dans le ventre muet
Le sang a démonté le bois
Par la peur qui sèche
A l’extrémité des mains
Le froid a repassé la terre
Le corps s’est déguisé
Le ventre neigeant s’est mis à mourir
Il y eut un orage dépecé par un loup
Je plais au sang
Pour un ventre qui s’aurore
Pour un pli décousu
J’entends le parapluie
D’une gaine qui me viande
J’habite un cri
Je ventre
La terre en vrac enchaînée dans une eau
Lorsque les mots très lourds lugubrent la distance
Comme un œil qui touche le retour
Le sang a vrai dire qui chausse une plaie
La mort qui seule une angoisse future
La cuisse brûlée où mangent les crayons
Je tarde un crâne qui recrâne
J’ai lait j’ai vie
J’amorce le froid jusqu’aux mètres de l’angoisse
Je touche Humide qui saigne à mon doigt
Je fais des yeux
Sans me mettre en voyage
A quelque pas d’un flocon de chair
Je verse mes doigts qui gouffrent l’Ici
Dans un crâne qui s’humide
Dans un ventre joui
Je neige après ma tempe
Je lave mes cris
L’espace le trou qui remince
Je sexe et je dalle
Par un cri qui broute à mon doigt
La touche de la distance
J’habite un meurtre rue d’amour
La mort viande
Editions P.J. Oswald, 1974
Du même auteur :
La mort viande (20/11/2019)
D’un sang à l’autre (20/11/2020)
Sang déplié (20/11/2021)
Soir inédit (20/11/2022)