Kamal Ibrahim (1942 - 2021) : Sang déplié
Sang déplié
La mort est blonde comme un canapé de filles
Les rêves me poussent dans les mains
Lorsque j’administre les montagnes
Comme les risques de septembre qui ne dorment que tout bas
Les fleurs me cassent et les cris me réparent
Je mords un bruit qui frise les chardons
Un homme de sang
Qui sèche au pied des feuilles
Une femme en joli crâne d’hiver
Un souvenir comme une cicatrice
Ma mère et moi
Commettre un soleil pour extraire la nuit
De sa plus belle chemise
Prendre un tunnel à chaque blessure
Mettre un cri à la place des mains
Comme font les montagnes lorsqu’elles toussent
Un poumon par-ci une douleur par là
La mort qui blonde comme un couple de sang
Le sexe qui distingue un dessin d’avril
Il fera deux silences à la veille du monde
Quinze froids dans un pli d’amour
La jambe éteindra le corps comme une rose
L’œil mangera un réseau de peaux
Le comprimé d’absence dans le sucre très petit
Le jet d’hirondelles d’un cuissot de veuve
Il y aura dans cette mort des cauchemars très polis
Pour ma bicyclette blanche
La lune ne sera qu’une cendre déroulée
L’étoile qu’un fil à peine télégraphique
Il y aura des pierres dans le ventre d’un suicide
Des fleurs châtiées comme des roses moustachues
La mort poile et remonstre
La terre bande à coups de pays
Le soir ne marbre qu’une cuisse qu’un rubis
Il fait désir il fait ici
Je sangs la peur
D’un bleu qui me remplit
Goutte à goutte
J’en cuisse à ma mère inachevée
Mon père m’inouït d’un crâne désir
Ma sœur me casse
Je vends mes cris aux portes des couleurs
La mort viande
Editions P.J. Oswald, 1974
Du même auteur :
La mort viande (20/11/2019)
D’un sang à l’autre (20/11/2020)
Soir inédit (20/11/2022)
Ventre articulé (20/11/2023)