Robert Creeley (1926 – 2005) : Limites
Limites
Pour l’anniversaire de Pen
(tous les jours)
Limites du champ, les fleurs bleues, le lavis roussâtre des
herbes, la découpe du sentier vert menant au carré
de jardin envahi de sauvageons et d’herbes folles –
vert avant tout, mais la lumière, l’entaille du soleil
limite chaque changement des détails tranchants, agrandis
- même les pierres enclines à être grandes, les ombres agglomérant
leur masse, et voyant ainsi je pouvais poursuivre jusqu’à une autre
limite du champ lointain, où les arbres sont épais sur la
limite du ciel, pensant je ne suis pas simplement une réponse à ça, cette lumière
pas seulement une opération qui voit et voile vaguement , ajoute une opinion.
Il n’y a pas d’opinion pour la vie, pas de mot plus ou moins général.
J’étais parti et revenu, encore et encore, pour te trouver finalement,
avais senti tout rassemblé, comme ici, pour être un lieu encore, et voulu
décortiquer la cosse de l’habitude, m’élever jusqu’à toi dans ce soleil.
Si c’est l’âge, alors qu’importe l’âge ? Si c’est vieux ou jeune,
quel moment le constate ? Dans cette retenue il ne peut pas
y avoir un autre lieu ou temps. Tout cela vit d’être
ici et maintenant, ce désir persistant, douleur de la promesse, supplice de tout le
perdu.
Maintenant comme si ce moment s’était en quelque sorte fortifié d’un corps,
était devenu toi, juste ici et maintenant, les merveilles inséparables.
Traduit de l’américain par Bernadette Casès et Brice Petit
In, Revue « Moriturus N°3-4, avril 2004 »
Editions Fissile, 09310 les cabannes, 2004
Du même auteur :
« Est-ce que tu penses... » / « Do you think that if ... » (08/10/2014)
Premier amour (02/03/2022)
Le temps est établi / Cieux (02/03/2024)