René - Guy Cadou (1920 – 1951) : La Haie Longue : 1km
Portrait de René Guy Cadou, par Smoka (7m. sur 7), Louisfert (Loire-Atlantique)
La Haie Longue : 1 Km
Toi dont la jambe traîne un peu comme une brume (1)
D’été et comme si la douleur te tirait
Lentement vers la terre ô compagnon que j’ai
Choisi pour les yeux, enfin voici que s’allume
Toute ma vie et que je vois l’éternité
Pareille à ce pays mouvant où tu t’enfonces
Avec ta jambe un peu trop lasse dans l’été
Sous les sourcils trop bleus de la nuit qui se froncent
Ils marchent près de nous les amis de haut bord,
Grands couturiers de la saison, veneurs des villes
Eteintes, des couchants désolés, vers le port
Au pavillon de clair soleil inaccessible
Entre nous deux celle que j’aime et que tu prends
Pour un pommier sauvage, et toujours aussi belle
La poésie comme une graine dans le vent
Qui s’ouvre et se referme aux battements des ailes
Des maisons sont couchées sur des enfances basses
Pleines de géraniums et de bouquets chanteurs
Au creux de la vallée ce sont les trains qui passent
Et le convoi des solitudes sans chaleur
Mais près d’ici la bonne auberge, la tonnelle
Où volètent les mains fluviales les prénoms
Aimés ; et sur la table ronde qui chancelle
un verre vide avec des larmes dans le fond.
(1) Il s’agit du poète Michel Manoll, qui claudiquait
Hélène ou le règne végétal
Pierre Seghers éditeur, 1951
Du même auteur :
« La nuit ! la nuit surtout… » (18/01/2014)
« Je t'attendais ainsi qu'on attend les navires… » (18/01/2015)
Les visages de solitude (18/01/2016)
Hélène (18/01/2017)
Celui qui entre par hasard (18/01/2018)
L’inutile aurore (18/01//2019)
Cornet d’adieu (18/01/2020)
La maison d’Hélène (18/01/2021)
Automne (18/01/2023)