René-Guy Cadou (1920 – 1951) : La maison d’Hélène
La maison d’Hélène
Il a suffi du liseron du lierre
Pour que soit la maison d'Hélène sur la terre
Les blés montent plus haut dans la glaise du toit
Un arbre vient brouter les vitres et l'on voit
Des agneaux étendus calmement sur les marches
Comme s'ils attendaient l'ouverture de l'arche
Une lampe éparpille au loin son mimosa
Très tard les grands chemins passent sous la fenêtre
Il y a tant d'amis qu'on ne sait plus où mettre
Le pain frais le soleil et les bouquets de fleurs
Le sang comme un pic-vert frappe longtemps les coeurs
Ramiers faites parler la maison buissonnière
Enneigez ses rameaux froments de la lumière
Que l'amour soit donné aux bêtes qui ont froid
A ceux qui n'ont connu que la douceur des pierres
Sous la porte d'entrée s'engouffre le bon vent
On entend gazouiller les fleurs du paravent
Le coeur de la forêt qui roule sous la table
Et l'horloge qui bat comme une main d'enfant
Je vivrai là parmi les roses du village
Avec les chiens bergers pareils à mon visage
Avec tous les sarments rejetés sur mon front
Et la belle écolière au pied du paysage.
Hélène ou le règne végétal
Pierre Seghers éditeur, 1951
Du même auteur :
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