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Le bar à poèmes
29 juillet 2020

Jean Rousselot (1913 – 2004) : Sept petites plaintes

 

jean-rousselot[1]

 

 

Sept petites plaintes

 

Comment dire

Et pourquoi

 

A quel égal que j’ignore

 

Ce charroi cette ornière

Ce tremblement

Ces choses qui s’affolent

Sous la roue

 

Et que je suis tout cela

Roue et douleur

Parois pavés paroles pour

Trembler

 

Trembleur qui creuse l’ornière

Comme on bricole

 

*

A quoi bon maintenant

Que tu m’as livré aux menues bêtes du temps

Feindre de durer

 

Le voudrais-je comment subsister

Si je n’ai plus à brouter

Le chèvrefeuille de ta voix ?

 

Et comment Etre

Si je n’ai plus pour refuge ton refus

D’Exister ?

*

Au plus que puis-je ?

Violoner en trébuchant

Jusqu’à l’estuaire du verbe Vivre

Les trois syllabes de ton nom

*

Et me voilà vieil homme

Offusqué par l’été venu quand même

Un moteur qui va

Des réponses qu’on fait

 

Où était-ce et quand

Pour la dernière fois

L’indulgent oubli la joie

Ouvrière des mains

La note tenue avec

 

Jusqu’au souvenir des justes causes

D’ailleurs et d’ici

S’en est allé de moi

Depuis que tu as mis fin

A mon éternité

 

*

Ai-je vécu

Il ne s’est jamais rien passé

Que toi

 

Et seul demeure de moi

En moi

Ce que tu as fondé

 

Toi qui ne sais pas les mots qui lèvent

Toi dont une plume d’ange

Ecraserait la main

 

*

Que vais-je faire de moi

Si tu n’es plus que quelqu’un ?

Que va devenir ce monde

Si le temps y règne à ta place ?

 

*

Gravas tessons voilà ma vie

Oui c’était ça qui se prenait pour

Du blé tardif

Sous toi ma neige

D’un coup fondue

 

Fallait-il encore

Que tu y ajoutes

L’ortie la rouille

 

Et ce laser qui va me poursuivre partout ?

 

In, revue « Sud, N°17 »

Marseille, 1975

Du même auteur :

Il faudrait être encore plus simple (18/09/2016)

Retour (29/07/2019)

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