je suis né

là où le marigot disparaît /

sous sa peau de déchets

et les maisons sous le voile

de sa colère saisonnière

là dans le voisinage des

vécés / j’ai passé mon enfance

forgé mes rêves de large

dans la crinière folle de l’eau

qui mugit / je me suis

baigné enfant

là où la ville déverse

ses ordures / ses cadavres

dans sa maison dont nous

aurions déguerpi dans

vingt-quatre heures

j’ai pataugé garçon

là dans la boue / des blanchisseurs

du tout Yaoundé

dans la gueule béante

de l’esprit des eaux

qui ne m’a pas encore avalé

je suis né

ET VIS

Quand les eaux se retireront /

après

/ la décrue évidente l’on

verra

des morceaux de viande

et les uniques / chaussures

de la dernière vie

des pans d’homme mais

assurément des

restes

infectés

des marécages du cri

de la bue / à perte de vue semée

d’hommes tus une fois de plus

gnaka gnaka

pour dire le passage / de la énième

tempête

/ de la énième livrée

de ceux qui toujours paient pour

l’or

DES AUTRES

Elobi

Éditions Saint-Germain-des-Prés, 1995

Du même auteur : Farewell to hell (27/07/2020)