Maurice Bourg (1918 -) : Lecture
Lecture
I
Oui, j’ai lu la Forêt, étage après étage.
Je me suis ancré dans le nœud de ses racines, dans l’aubier de son aubier,
dans le parfum de son parfum.
Avec les yeux du lynx, l’ivresse de la grive, je l’ai feuilletée, saisons après
saisons. Rugueux en sont les mots comme l’écorce. Mais frais, encore de
feuillages arrachés à l’enfance.
Toujours derrière ma lecture, ce frissonnement léger, affirmation de feuille !
II
Ma Forêt, sur la page blanche, la parenthèse verte !
Entre les guillemets des saisons, sa phrase lovée comme un serpent. Sa
majuscule qui s’enferre dans le point final. Toutes ses propositions si familières.
Gland miellé offert aux lèvres. Branches nidifiées d’où l’oiseau s’échappe. Insecte
sous l’écorce, comme une promesse d’envol.
Ma Forêt, parenthèse faite de milles renaissances.
III
Cet alphabet d’eau et de lumière !
Avec ses lettres riches en sucs, en nœuds, en ramures. Ses lettres qui forment
touffes, qui s’étendent. Toutes les lettres que la Forêt ne cesse d’agiter, hors du
temps.
Cet alphabet du premier jour,
à l’intention de ceux qui connaissent.
Saisons qui portez tout
Librairie Saint-Germain-des-prés, éditeur, 1974
Du même auteur :
« Quelques fumerolles couleur de feu… » (20/11/2015)
Que vienne la parole (20/11/2016)
En venue (20/11/2018)