André Delons (1909 – 1940) : « Il n’y pas de nuages sans elle… »
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« Il n’y pas de nuages sans elle, Etoile de la dernière heure,
fourche des jambes embuées de lave et de douceur, dernier
horizon aperçu par le sommeil, dévalant à grand bruit, et sous
le silence des orages qui ne finissent pas, la pente de ses cheveux
couleurs de nuit.
Il n’y pas de marais sans brumes, mais il n’y a pas non plus
ce grand sourire hautain tournant comme un feu sans l’indéchiffrable
odeur qui tremble au milieu d’une chambre promise aux vents.
Il n’y a pas d’aigle sans désirs.
Il n’y a pas d’aveugle sans regard.
Il n’y a pas de bonheur.
Mais il n’y jamais ce chant tournoyant et délivrant, cette Parole
de toujours, cette terrasse de splendeur portée entre les bras du jour,
il n’y a pas ce chant et cette bouche qui chante, et ce corps qui chante
cette bouche, et ce désir qui chante ce corps qui l’emporte à sourire,
s’il n’y a pas Celle même qui attend encore, au milieu des palmes et
des pluies, d’être déliée de son ombre. »
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L’homme désert, Revue « Bifur, N°4
Editions du Carrefour, 1929