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Le bar à poèmes
7 décembre 2024

Evelyne Trouillot (1954 -) : Sans parapluie de retour

 

Sans parapluie de retour

(Extraits)

 

Plus rien ne demeure

si ce n’est ton haleine

aux alentours de mon rire

J’ai habillé la nuit

de choses tendres

mais qui peut effacer

le profil calciné

des clairs de lune ?

................................

 

J’ai posé mes rêves sur la pointe du lit

pour que ne tremble point

la poussière de nos yeux

 

Pays de boues incandescentes

et de pétales en croix

Amour d’écumes de déraison

apprends- moi à marcher à petits pas

car la pluie s’impatiente

et les fleurs se rebellent

Pays de soleils irréels

le ciel attend

ton signal pour arrimer les étoiles

................................

 

Villes d’anses et de fleurs

un enfant du pays

sur la route

couché

cœur en l’air

soleil éclaboussé

côté malheur

Villes éphémérides

un petit  prénom

brutal

de griffes et d’entrailles

s’est endormi

sous les dalles

les poings fermés

Qui portera le deuil ?

 

A ma fenêtre

un oiseau à tire-d’aile

J’ai mal aux cheveux gris

................................

 

Entre mots et néant

l’encre trébuche

devant l’angoisse de naître

Comment garder

le poids de ta main

au chaud dans cette blessure

exclusivement mienne ?

 

Amour des espaces interdits

rejoins-moi

en marge de ce qui fut

................................

 

Au bout du regard

ma tendresse décrochée

au mal-être de la terre

son ombre sous mes pieds

mes reniements

mes envies de fuite

et mes deux bras ouverts

Tant de trous dans le ciel

de haines et de chimères

 

Face aux espaces

régulateurs

des consciences et des rues

Sursaute en moi

nid précaire bec ouvert

un petit oiseau téméraire

 

Qui ose encore aimer ce pays

et le dire ?

................................

 

Il me vient parfois la pudeur

de la mer

devant le sable

................................

 

Soleil sanglant

d’aubes défaites

de l’enfance à la mer

des montagnes au grand port

A jamais m’éclater en toi

des collines aux chaussées

de la peur

au bleu immense de ton ciel

désarroi des yeux ballants

 

 

Sans parapluie de retour

Port-au -Prince, 2001

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