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Le bar à poèmes
13 janvier 2021

Jean / Hans Arp (1887 – 1966) : Quatre poèmes

jean-arp[1]

 

Poèmes

 

1

les rois coiffent les forêts brandissent les oiseaux grisés et vont aux thermes

     sur leurs cannes en fer

les bêtes en croissance dansent sur des cothurnes en verre

les troncs d’arbres se font leurs oiseaux sur mesure

les oiseaux flagellés perdent tout leur sang dans la collonade

 

2

 

les fouets claquent et des montagnes descendent les ombres bien coiffées des

     bergers

les œufs noirs et les grelots des fous tombent des arbres

les orages les grosses caisses et les tambours saillissent des oreilles des ânes

les ailes frôlent les fleurs

les sources bougent dans les yeux des sangliers

zurich, 1916.

 

3

l’un après l’autre

en bas se promène la chair étrangère

à l’œil sec

et porte dans chaque ride un ventre

lentement elle peut dire son nom

mot par mot

ligne par ligne

parce qu’elle roule derrière elle

elle se va bien

se comprend

et se connaît toujours

trois fois elle frappe contre son doigt

entrez entrez entrez

alors le contour de sa respiration se tient debout

avec des lèvres de mercure

sur sa langue

qui se glisse au dessous d’elle

avec des roues carrées

qui tournent

quand les rais s’arrêtent

et qui s’arrêtent

quand les rais tournent

année par année sont des années sans années

jour par jour sont des jours sans jours

ainsi vont aussi les bottes au pas articulé

à travers le tuyau de chair vivante

pas par pas

sans gêne avec les couches de leurs années

dans les cages bien collantes et ajustées

année par année sont des années sans années

rome, 1922

 

4

mais  qu’est-ce qui le remplacera

 

du sommet de la table tombent les ailes

comme des feuilles de terre

devant les lèvres

dans les ailes il fait nuit

et entre les ailes manquent les chaines chantantes

 

le squelette de la lumière vide les fruits

 

le corps des baisers ne se réveillera jamais

il n’était jamais réel

la mer des ailes berce cette larme

la cloche parle avec la tête

et les doigts nous conduisent à travers les champs de l’air

vers les nids des yeux

là se fondent les noms

 

mais qu’est-ce qui le remplacera

dans la hauteur des cieux

ni sommeil ni veille

car les tombeaux sont plus clairs que les jours

paris, 1929

 

in, Revue «Bifur, N° 5,

Editions du carrefour, 1930

Du même auteur :

Place blanche (13/01/2019)

Joie noire (13/01/2020)

Cuis-moi un tonnerre (13/01/2022)

Une goutte d'homme (22/01/2023)

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