Kenneth White (1936 - 2023) : « La pensée est une pensée... »
La pensée est une pensée à coups de vagues
Et les mains tiennent la barre
Oui, la barre du monde
Et la poésie nage, rouge
Dans les abîmes de la mer
La poésie des profondeurs contre laquelle je troque ma vie
Et je la sens comme je sens mon sang
Et comme je sens le pays où je vis
Voilà, c’est là
En douceur – serre
Et les filets s’enfoncent en ondulant
Tandis que les premiers cheveux gris de l’aurore
Se montrent dans le ciel
Attends, attends le temps qu’ils dérivent
Dérivent
Dans le monde rouge et noir
Attends tout en fumant
Et tout en fredonnant
Tandis que les filets s’épaississent et se gonflent
Et alors hisse
Hisse toi-même
Hisse à bord la masse convulsive de ta blancheur
Et chavire ta mort dans la cale
Et après çà retourne-t’en
Le moteur battant doucement
En doublant les Mamelles
Vers le rivage
Vers un matin grisonnant comme un vieux
(Poèmes du monde blanc)
Traduit de l’anglais par Pierre Leyris
In, Kenneth White : « En toute candeur”
Editions du Mercure de France, 1964
Du même auteur :
Le Grand Rivage (1 - 53) (06/09/2014)
La porte de l’ouest (02/09/2015)
Lettre à un vieux calligraphe (03/09/2016)
Théorie (03/09/2017)
Java (03/09/2019)
La rivière qui traverse le temps (03/09/2020)
Le testament d’Ovide (03/09/2021)
En toute candeur (03/09/2022)
Cérémonie d’hiver (03/09/2023)