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Le bar à poèmes
1 juin 2016

Claude Michel Cluny (1930 – 2015) : Manhattan and C°

 

CLAUDE+MICHEL+CLUNY[1]

 

 

Manhattan and C°

New York, the Big Apple.

 

Par la fenêtre ouverte sur la nuit et Central Park

on entendit  on entendit longtemps

mourir le halo orange du rock

Un jour viendra sans inutile envie de renaître

un autre dimanche mort

alors seront Parques à New York.

 

Pas de black out pour l’aurore

apothéose qui se lève et bande

avec des caresses de fin du monde

et des poses de star

dans les façades en verre de l’East River

Eclats de mouettes qui volent

à jeter un sort

le Chrysler coupe ses ongles d’acier

dans un ciel de soleil rose.

Faux athlètes joueurs

les New-yorkais s’en vont

sans regard

alourdis de miel et de lait

L’haleine blanche des morts monte du sous-sol

parmi les poubelles du vent

 

on entend

l’appel de sirène du paquebot blanc de Gênes

chargé de reliques industrielles

et de prières plombées à vous faire la peau

et de veuves mauves américaines

aux dents de fausse porcelaine

qui rient seulement la nuit

dans un verre d’eau minérale.

 

Old Bastard Apple

juive, noire et chinoise idole

se lève-t-elle encore du fond de tes entrepôts

ou de tes blocks de crasse

qui se douchent les jours d’incendie

la charmante odeur du chèvrefeuille

au feuillage vert dollar ?

Mais tu respires le fuel

la viande grasse grillée

la sueur mal léchée de tes foules aveugles

dont le métro tatoué

aux bombes aérosol

meugle en traînant les wigwams de paumés

- libres

bâillonnés au chewing-gum.

 

(Tu es libre,

accoudé au comptoir tu penses un peu court

au Magnum des flics calibre

à trouer du béton,

à ton sexe de luxe

luisant d’embrocation solaire bon marché

lubrifiant le zip d’un jean

à belle ceinture d’herbe

ou bien cloué d’amphétamines sinistres

Tu es là,

debout, à mâcher tes sacro-saints hamburgers

farcis de lames de rasoir

la bouche rose rouge

comme une révolution

programmée par les flippers

ou le néon des théâtres de Broadway)

 

Grosse pomme fastueuse

(et les savants disent : inhumaine inhumaine)

aux tendresses infinitésimales

magicienne au chic de femme parfaite

(comme les huîtres de la Gare centrale)

toi que la musique des voitures de police

scie en tranches le jour et la nuit,

tu renais toujours de tes grands catafalques

de verre fumé

de tes cent dix étages gothiques

découpés à vif

dans tes ruissellements

d’éclairage hémorragiques

Tu renais des illusions porto-ricaines

du gâchis de ces corps de charme

qui tuent comme des lames

ou crèvent d’une over-dose

(acide ou bacille de Koch).

 

Vieille pomme ! La mère Liberté (à cause

du vent du large) garde sa sérénité.

 

Automne-moi !dit l’hiver,

revenons un peu sur nos pas

- mais la fanfare d’Harlem

est déjà louée

pour le naufrage imminent

de nos lointaines années.

 

Inconnu passager

Editions Gallimard, 1978

Du même auteur :

La mémoire du sel (11/04/2015)

 

D’autre planètes (02/06/2017)

 

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