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Le bar à poèmes
8 octobre 2021

Jean-Joseph Rabéarivelo (1901 – 1937) : Flûtistes

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Flûtistes

 

Ta flûte,

      tu l’as taillée dans un tibia de taureau puissant,

     et tu l’as polie sur les collines arides

     flagellées de soleil ;

     sa flûte,

     il l’a taillée dans un roseau tremblotant de brise,

     et il l’a perforée au bord d’une eau courante

     ivre de songes lunaires.

 

Vous en jouez ensemble au fond du soir,

     comme pour retenir la pirogue sphérique

     qui chavire aux rives du ciel ;

     comme pour la délivrer

     de son sort ;

     mais vos plaintives incantations

     sont-elles entendues des dieux du vent,

     et de la terre, et de la forêt,

     et du sable ?

 

Ta flûte

     tire un accent où se perçoit la marche d’un taureau furieux

     qui court vers le désert

     et en revient en courant,

     brûlé de soif et de faim,

     mais abattu par la fatigue

     au pied d’un arbre sans ombre,

     ni fruit, ni feuilles.

     Sa flûte

     est comme un roseau qui se plie

     sous le poids d’un oiseau de passage –

     non d’un oiseau pris par un enfant

     et dont les plumes se dressent,

     mais d’un oiseau séparé des siens

     qui regarde sa propre ombre, pour se consoler,

     sur l’eau courante.

 

Ta flûte

     et la sienne –

     elles regrettent leurs origines

     dans les chants de vos peines.

 

Presques songes (Traduit du hova par l’auteur)

Chez Henri Vidalie, Tananarive (Madagascar), 1934

Du même auteur :

Traduit de la nuit (08/10/2019)

Danses (08/10/2020)

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