Francisco de Quevedo y Villagas (1580 – 1645) : « J’aurai vu les remparts... » / « Miré los muros... »
J’aurai vu les remparts de ma patrie,
Si forts jadis, déjà démantelés,
Céder au pas du temps, contre lequel
Désormais leur vaillance ne tient plus.
J’aurai vu dans les champs le soleil boire
Le fil de l’eau où le gel se délie
Et les troupeaux chercher en vain les bois
Qui dérobaient jadis le jour au jour
J’aurai vu ma maison vile dépouille
De ma vieille demeure d’autrefois,
Mon bâton infléchi et moins solide,
Et mon épée abattue par les ans ;
Plus rien où poser les regards, plus rien
Qui ne soit signe et rappel de la mort.
Traduit de l’espagnol par Mathilde Pomès,
in, « Anthologie de la poésie espagnole »
Librairie Stock, 1957
Du même auteur : A Rome, ensevelie sous les ruines / A Roma sepultada en sus ruinas (11/01/2019)
Miré los muros de la patria mía,
Si un tiempo fuertes, ya desmoronados,
De la carrera de la edad cansados,
Por quen caduca ya su valentia.
Salíme al campo, ví que el sol bebía
Los arroyos del hielo desatados,
Y del monte quejosos los ganados,
Que con sombras hurtó su luz al dia.
Entré en mi casa ; ví que amancillada
De anciana habitación era despojos ;
Mi báculo más corvo y menos fuerte.
Vencida de la edad senti mi espada,
Y no hallé cosa en que poner los ojos
Que nos fuese recuerdo de la muerte.
Poème précédent en espagnol :
Federico Garcia Lorca : L’infidèle / La casada infiel (19/12/2020)
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